Qualité de l’audit et la compétence et l’indépendance individuelles et collectives

Qualité de l’audit et la compétence et l’indépendance individuelles et collectives

II. La qualité de l’audit et la compétence et l’indépendance individuelles et collectives

Pour étudier la qualité au niveau individuel et collectif, sont tout d’abord présentés les critères explicatifs de la qualité ayant un impact négatif sur la qualité de l’audit puis les critères explicatifs ayant un impact positif et enfin des critères explicatifs spécifiques : l’intuition, l’interprétation et l’expertise de l’auditeur.

Chapitre 3 – Grille de lecture de la qualité de l’audit et des pratiques de politique qualité

II. 1) Les critères explicatifs impactant négativement la qualité de l’audit

Il existe en effet une forte relation entre la qualité de l’audit perçue et les comportements dysfonctionnels (Pierce et Sweeney, 2005) qui sont associés à des « non compétences » ou défauts de compétence.

Les typologies établies par Mc Nair (1991) et Malone et Roberts (1996) synthétisent les différents comportements qui peuvent être associés à des « non-compétences » susceptibles de réduire la qualité de l’audit :

  1.  la réduction du temps de travail accordé à l’audit;
  2.  la revue superficielle des documents soumis à examen;
  3.  l’acceptation d’explications non recevables de la part des clients;
  4.  l’échec dans l’établissement et l’administration d’un questionnaire.

On peut également distinguer les mauvais comportements des comportements non professionnels (Pierce et Sweeney, 2005). Les premiers sont représentés par une mauvaise supervision ou une évaluation trop rapide de la performance de l’équipe. Les comportements non professionnels sont, par exemple, la recherche d’un nouveau travail, le fait de médire sur l’entreprise ou la hiérarchie ou de semer le doute sur l’efficacité de l’audit ou sur les méthodes de l’entreprise (Herrbach, 2001). Tous ces comportements sont susceptibles de réduire la qualité de l’audit en agissant directement sur compétences individuelles et d’équipe.

La présence de tels agissements s’explique notamment par l’influence du leadership (Otley et Pierce, 1995), une compétence essentielle pour la qualité de l’audit. En effet, selon le mode de leadership les seniors d’un cabinet d’audit sont plus ou moins susceptibles d’affecter la qualité de l’audit. Le leadership est de plus un bon moyen pour se prémunir contre les comportements réducteurs de qualité.

II. 2) Les critères explicatifs impactant positivement la qualité de l’audit

a Le critère de l’indépendance

L’indépendance permet à l’auditeur de rapporter les anomalies et erreurs qu’il a relevées durant l’audit (qualité de révélation), elle est ainsi un des deux déterminants de la qualité de l’audit. Mais elle peut également être considérée comme un critère explicatif de la qualité de l’audit.

Elle est définie par Lee et Stone (1995, p. 1173) comme un état mental dans lequel l’auditeur n’est ni relié ou subordonné à l’influence et aux pressions de conflits d’intérêts; ou encore par Prat dit Hauret (2003, p. 32) comme la capacité réelle de l’auditeur à s’assurer du respect des règles afin de donner une certification de qualité en révélant toute erreur, fraude, manipulation ou collusion des producteurs de l’information financière.

L’objectif auquel répond l’indépendance est de vérifier si l’auditeur est en position ou non de résister aux différentes pressions de son environnement comme les pressions du client ou de ses managers pour ne pas compromettre son indépendance. C’est dans ce sens que sont élaborées toutes les normes et standards professionnels afin de donner une image claire et communicable de l’indépendance de l’auditeur et afin d’éviter que l’auditeur ait à choisir entre l’émission d’une opinion sincère et la poursuite de la relation d’affaire.

Pour Prat dit Hauret (2003), l’indépendance s’analyse par l’indépendance d’esprit et également par l’apparence d’indépendance. De la même manière, selon Richard (2006), le concept de l’indépendance de l’auditeur doit être analysé en termes d’indépendance dans les faits et d’indépendance en apparence ou encore d’indépendance perçue. En effet, même si un auditeur est indépendant dans les faits, il se doit de faire la démonstration visible et compréhensible de cette indépendance.

On oppose donc traditionnellement l’indépendance réelle qui porte sur la capacité de l’auditeur à révéler des anomalies à l’indépendance perçue qui porte sur le niveau d’indépendance tel qu’il apparaît aux acteurs et au public de l’audit.

Pour qualifier l’indépendance, il est également possible de solliciter un ensemble de critères recensés par Prat dit Hauret (2003) dont la taille du cabinet, la réputation, la gouvernance, la rotation des auditeurs ou encore les honoraires d’audit.

Ben Saad et Lesage (2009) présente également un ensemble de facteurs pour expliquer l’indépendance en distinguant eux aussi l’indépendance réelle de l’indépendance perçue. Ces facteurs sont liés à l’auditeur (compétence, taille du cabinet, réputation et éthique), à l’audité (mode de gouvernance, propension à gérer les résultats), à l’auditeur et à l’audité (rotations des auditeurs, incompatibilité entre auditeur et audité, management advisory services et honoraires d’audit) ou à l’environnement (responsabilité juridique, contrôle de la profession).

On remarque que tous ces critères cités par Ben Saad et Lesage (2009) et Prat dit Hauret (2003) sont similaires aux critères explicatifs de la qualité de l’audit développés dans cette section. Ce constat pointe le fait que l’indépendance est en elle-même un des deux déterminants de la qualité de l’audit, déterminants qui sont ensuite déclinés en critères explicatifs.

b Les critères de l’expertise, de la responsabilité et de l’efficacité

Selon Herrbach (2001), on distingue les qualités techniques (expertise) des comportements professionnels (responsabilité et efficacité). On distingue également la dimension techniciste de l’expertise pour l’auditeur (Tondeur, 2003).

Les qualités techniques utiles à un auditeur sont composées des connaissances particulières nécessaires pour réaliser un audit et sont corrélées positivement avec la qualité de l’audit (Frantz, 1999). Selon Bonner et Lewis (1990, p. 5) les trois types de connaissances et expériences nécessaires à l’auditeur sont : les connaissances générales comme celles des normes comptables, les connaissances spécifiques des secteurs d’activités des clients et enfin des connaissances en gestion.

Ces trois types de connaissances composent l’expertise de l’auditeur, en d’autres termes sa capacité à résoudre des problèmes en analysant et interprétant les données pour ainsi concourir à la qualité de l’audit. Le lien entre les connaissances spécifiques ou dites spécialisées et la qualité de l’audit a été montré empiriquement par Lowensohn et al. (2007) qui associent positivement ces deux notions.

Les connaissances techniques peuvent être complétées par des compétences éthiques qui repose sur la capacité et les aptitudes à rendre des jugements moraux selon Fortin et Martel (1997, p. 61). L’acquisition des connaissances techniques passe par des formations tout au long du parcours professionnel mais aussi par la capitalisation de l’expérience de l’auditeur. Libby et Luft (1993) propose un modèle indiquant entre autres des relations entre les connaissances et l’expérience.

Les comportements professionnels renvoient aux critères explicatifs de responsabilité et d’efficacité. La responsabilité est un critère complémentaire du critère d’indépendance. En effet, il ne suffit pas que toutes les conditions soient respectées (durée du mandat, aucun lien avec l’audité…) pour que l’auditeur soit totalement indépendant, cela dépend également de son attitude face à ses responsabilités.

Son comportement face à des conflits d’intérêts avec le client ou même avec le cabinet d’audit va donc dépendre de sa capacité à prendre ses responsabilités et à assumer jusqu’au bout ses choix. Il existe une relation nette entre la responsabilité et la qualité des choix des auditeurs (Willekens, 1996) qui va influer sur la qualité de l’audit.

L’efficacité153 est également un comportement professionnel qui se répercute sur la qualité de l’audit. Elle est associé à la capacité de l’auditeur à résister aux différentes pressions exercées sur lui par l’audité ou encore par le cabinet d’audit. Cette capacité va dépendre de son éthique professionnelle, de la vigueur et de la visibilité de ses actions, de l’interaction avec ses pairs ou encore de l’application des normes (Deis et Giroux,

1992).La relation positive entre l’efficacité d’un auditeur et la qualité de l’audit est mise en évidence par Elitzur et Falk (1996) et Trombetta (2003).

c Les critères de l’intuition et de la confiance

L’intuition ou interprétation des auditeurs comme critère explicatif de la qualité de l’audit est développée par Pierce et Sweeney (2005). Au-delà des méthodes d’audit et de la planification de l’audit, il ne faut pas sous estimer la capacité de flair et d’intuition des auditeurs qui peut permettre de découvrir une erreur ou une irrégularité dans un compte ou dans un service qui n’est pas inscrit au programme d’audit. Une bonne intuition peut se révéler être un atout important pour la qualité de l’audit et plus spécifiquement la qualité de détection (liée aux compétences).

Certains chercheurs voient en l’intuition et l’interprétation une menace à la qualité de l’audit. En effet, le pouvoir de l’auditeur (sa capacité à résister aux pressions et à obtenir une meilleure qualité) augmente lorsqu’il donne plus d’importance à son intuition et son l’interprétation (Magee et Tseng, 1990).

La perception et l’interprétation des auditeurs sont ensuite liées à la confiance et à la recherche d’intérêt personnel qui jouent conjointement un rôle sur la qualité de l’audit (Richard et Reix, 2002). Cette confiance se retrouve au sein de la relation auditeur-audité et son évolution est fondée sur la réputation de l’auditeur et son empathie. La relation auditeur- audité est très importante puisqu’elle va agir à la fois sur les compétences, la qualité des relations professionnelles et l’indépendance de l’auditeur (Richard et Reix, 2002).

153 On pourrait la définir dans le cadre de cette étude comme la propension de l’auditeur à mettre en jeu ses compétences, ce qui va dépendre de sa motivation.

L’auditeur devient plus compétent lorsque la qualité de la relation professionnelle est à son optimum et lorsque la relation auditeur-audité est égalitaire et donc caractérisée par la confiance. La confiance est ainsi un facteur explicatif important de la qualité de l’audit puisqu’elle agit sur un de ses deux déterminants, la compétence.

 

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
La politique qualité de la certification des comptes publics
Université 🏫: Université de Poitiers - Ecole doctorale sociétés et organisations
Auteur·trice·s 🎓:
Marine Portal

Marine Portal
Année de soutenance 📅: Thèse présentée et soutenue publiquement à la Cour des comptes - en vue du Doctorat des Sciences de Gestion - 4 décembre 2009
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