Profiter des synergies entres groupes de presse en ligne

3.3 Concentration entre médias
La troisième voie qui s’ouvre à la presse afin de rentabiliser au mieux ses avantages spécifiques sur internet serait d’abandonner toute prétention à la spécificité pour se fondre totalement dans le moule de l’internet. Cette stratégie vise à associer des groupes issus de différents supports hors-ligne pour obtenir des synergies entre médias.
Cette intégration peut avoir lieu à la fois verticalement, lorsque des diffuseurs spécialistes de l’internet s’associent à des producteurs de contenus (1), mais aussi horizontalement, si plusieurs groupes de médias mettent leurs forces en commun pour acquérir un avantage décisif sur la concurrence (2).
3.3.1 Profiter des synergies entres groupes
La numérisation a apporté, dès ses débuts dans les années 1990, des perspectives de synergies sans précédent pour les médias, qui se retrouvaient en position d’uniformiser les processus de gestion des contenus de leur production jusqu’à leur distribution chez le consommateur final, que ce soit sur un site internet, un téléphone mobile ou un téléviseur relié à l’ADSL. Les échecs retentissant des opérations entreprises par Vivendi, AOL/TimeWarner et Viacom/CBS ont laissé croire que cette vision était trop excentrique et finalement impossible à mettre en place. Il se pourrait cependant que ces fusions ratées n’aient été qu’en avance sur le temps (Gaffney, 2002). Les succès que connaissent Disney et News Corp. en suivant la même logique montrent que le modèle garde toujours sa validité.
La principale idée qui traverse ce mémoire est que les groupes de presse, et plus largement les médias traditionnels, ne peuvent rivaliser sur internet avec les pure-players, plus réactifs et plus inventifs, sauf sur un point, à savoir la production de contenus. Il devient alors logique de songer à un partage des missions entre médias traditionnels et pure-players, les premiers se chargeant de fournir les contenus, les second de les diffuser. Des évolutions récentes sur le marché de l’information montrent que plusieurs firmes se sont décidées à emprunter cette voie. CBS a annoncé au début du mois de mai que l’adresse de leur site devrait devenir « CBS.com/nobodycomeshere », soit « CBS.com/personne_ne_vient_ici » après avoir constaté leur incapacité à attirer des visiteurs sur leur site (Jacob, 2007). Pour la compagnie américaine « il est arrogant pour une compagnie média de penser que les consommateurs vont venir vers nous ». A la place, au travers d’un système de syndication, elle vendra ses contenus à des pure-players comme You Tube, Joost ou Veoh, spécialistes de la diffusion de vidéos sur internet.
En Europe, Eurosport suit le même chemin. La chaîne de sport paneuropéenne du groupe TF1 a en effet conclu un accord avec Yahoo! qui prévoit que ce dernier reprendra les contenus du site eurosport.com (excepté les versions françaises, russes et chinoises) sur le portail Yahoo! sports, permettant ainsi d’ajouter les fonctionnalités développés par le pure-player aux contenus d’Eurosport, notamment Yahoo! Answers, service collaboratif d’échange de connaissances (Andrews, 2007b http://www.paidcontent.org/entry/419-yahoo-launches-cobranded-sites-for-europes-biggest-sports-tv-network/). Le danger d’une telle intégration, pour un média traditionnel, serait de perdre de vue la production de contenus multimédias, dont on a vu plus haut la spécificité. Un recentrage sur les activités hors-ligne pourrait porter atteinte à la pertinence des contenus fournis au diffuseur, à moins bien sûr d’externaliser également leur édition et leur mise en forme.
Aucun journal n’a, pour l’instant, été aussi loin dans l’intégration verticale des contenus. En ce qui concerne la publicité en revanche, 264 quotidiens américains se sont déjà alliés à Yahoo!, leader des publicités de display sur le web. La mise en commun des capacités de recherche et de ciblage de Yahoo! avec le pool d’annonceurs des quotidiens locaux devrait permettre aux deux parties de l’accord d’augmenter leurs revenus (Helft, 2007 http://www.nytimes.com/2007/04/17/technology/17search.html?ex=1334462400&en=083d6a474d6cfe0e&ei=5088&partner=rssnyt&emc=rss). Plus généralement, le rachat par les trois leaders de la recherche en ligne, Google, Yahoo! et Microsoft, de poids lourds de la publicité, respectivement DoubleClick, Right Media et aQuantive, montre la volonté pour ces acteurs historiques du web de devenir le point central des annonceurs dans leurs campagnes crossmedia. Google a ainsi développé un outil permettant de vendre des espaces à la fois sur internet et sur papier ainsi que sur les stations de radio de son partenaire Clear Channel. Microsoft, de son côté, prévoit d’utiliser le web pour diffuser la publicité sur la télévision câblée.
Ces évolutions arriveront sans doute bientôt en Europe et en France, marquant ainsi le début de l’externalisation des missions secondaires de la presse. Libérés des problèmes de diffusion, si les exemples d’Eurosport et de CBS se transposent à la presse, et de recherche d’annonceurs, les journaux pourraient alors se focaliser sur leur point fort et principale mission, la production de contenus.
Lire le mémoire complet ==> (Quelle place pour la presse en ligne à l’heure du Web 2.0 ?)
Mémoire de fin d’études
Institut d’études politiques de Lille, section Economie et Finance

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