Le marché du don : Grandes tendances du secteur associatif

Le marché du don : Grandes tendances du secteur associatif

III. Le marché du don

1. Grandes tendances et actualité du secteur1

La population française compte 46% de donateurs réguliers quelle que soit la forme du don, soit près de 21 millions de personnes âgées de 15 ans et plus.

Le montant total des dons approcherait les 1,9 milliards d’euros.

  •  Les formes de don
  •  23% de la population française âgée de 15 ans et plus donne par chèque,
  •  16% de la population française âgée de 15 ans et plus donne de l’argent de la main à la main.

En résumé, et en pourcentage des donateurs on compte :

  •  39 % de donateurs en argent, soit 8,2 millions de personnes dont 4,8 donnant par chèque et 3,4 donnant de l’argent de la main à la main.
  •  29 % de donateurs en nature, soit 6,1 millions de personnes.
  •  16 % de donateurs en temps, soit 3,4 millions de personnes.
  •  Les causes

C’est l’aide aux personnes en difficulté et les services sociaux qui attirent le plus de dons :

49% des personnes qui ont donné en mars – avril 2002 se sont orientées vers cette cause.

29 % d’entre elles ont donné pour la santé et 24 % pour la recherche et la recherche médicale.

L’aide au Tiers-monde est en légère progression avec 1 point de plus à 18%. L’environnement gagne 2 points par rapport à 2000 mais reste à 5%.

– Les facteurs du don

La propension à donner augmente avec l’âge.

Ce sont les personnes âgées de 65 ans et plus qui sont les plus fortement donatrices (60 % de cette tranche d’âge sont donateurs réguliers)

La propension à donner augmente avec le niveau de revenu, ainsi si l’on compte 30% de donateurs réguliers chez les ouvriers, ils sont 55 % chez les cadres supérieurs.

Les habitants de la région parisienne sont plus fortement donateurs : ils sont 52 % à donner régulièrement, contre 39 % en zones rurales.

La pratique de la religion catholique et la proximité de la vie associative demeurent des facteurs déterminants au don.

La contribution de chaque catégorie au montant global des dons

Les plus de 50 ans contribuent pour 66% du montant global des dons sur l’année.

Les jeunes de moins de 35 ans, pour 10 %.

Les donateurs sans enfants contribuent pour 74 % du montant global des dons sur l’année.

Les catégories socioprofessionnelles peu aisées contribuent pour 10 % du montant global des dons pour l’année. Les inactifs pour 49 %.

Tous types de dons confondus, la population française compte 45% de donateurs réguliers en Mars-Avril 2002 contre 57% en 2000 à la même période.

Cette baisse, générale, ne semble pas affecter plus particulièrement une cause ou une autre et le recul de la générosité est très inégal suivant les types de donateurs. Ce sont les plus jeunes qui se désengagent le plus depuis 2000.

a) Les Français seraient de moins en moins généreux2

Les dons effectués au profit du monde caritatif ont chuté en moyenne de plus de 30 % au cours des quatre premiers mois de l’année 2002, par rapport aux sommes versées pendant la même période de l’année précédente. Ceci est un recul historique, alors même que les associations ont multiplié les sollicitations : le nombre de mailings envoyés à la fin de l’année 2001 a notamment progressé de 18 %.

Cet inquiétant bilan est le fruit d’une étude réalisée par trois filiales de TBWA spécialisées dans le conseil et la communication des associations, Excel, Qualicontact et Non profit, qui ont épluché les comptes de dix grands noms de la générosité.

Daniel Bruneau, du Comité de la charte, fait le même constat. « Si la tendance se confirme, prévient-il, la baisse pourrait atteindre 50 % d’ici à la fin de l’année. »

Un sondage Ipsos réalisé les 4 et 5 mai 2002 pour le compte de TBWA, et présenté par l’institut, montre que cette désaffection du public pour les causes humanitaires est la conséquence directe de leur implication récente dans des affaires judiciaires.

La grande majorité des donateurs (53 %) déclarent « ne plus donner aux associations mises en cause dans des affaires ». Or, de la vénérable Société Protectrice des Animaux aux Restos du cœur, en passant par différentes ONG présentes en Afrique, nombre d’entre elles ont été épinglées pour des problèmes de gestion, de malversation et d’éthique.

« Le scandale de l’Arc a profondément marqué les esprits, explique le sémiologue Alain Mergier : 83 % des personnes interrogées le citent encore, alors que l’affaire remonte à 1996. Il a surtout provoqué une rupture dans l’opinion. Avant, les gens faisaient a priori confiance aux ONG, aujourd’hui, c’est l’inverse. »

Plus inquiétant encore, lorsqu’il s’agit de savoir quelles associations ont réellement été impliquées dans des affaires, les personnes interrogées font preuve de la plus grande confusion. Médecins Sans Frontières, Médecins du Monde, Fondation pour la recherche médicale, Unicef, ATD Quart-Monde, qui n’ont jamais été mises en cause, sont par exemple désignées plus fréquemment que la Fondation Raoul-Follereau, qui a pourtant fait publiquement son mea culpa en début d’année.

Les célébrations du centenaire des associations en juin 2001 ont, pour un temps repoussé les questions de fond qui secouent le monde associatif.

b) La condition sine qua non du don : la confiance

Il est important de noter que la condition sine qua non du don est la confiance que le donateur peut placer dans l’association. En effet, ne pouvant matérialiser ou recevoir de preuve matérielle de la bonne utilisation de son don, le donateur s’en remet aux informations que l’association veut bien lui donner.

D’après l’étude qualitative réalisée par Wei Opinion en 20023, on peut remarquer une évolution de la perception du don de la part du donateur depuis l’affaire Crozemarie (fait historique structurant dans la collecte de fonds).

L’affaire Crozemarie, que les donateurs appellent spontanément « le scandale de l’ARC », a marqué profondément les esprits. Ce n’est pas un épisode malheureux de l’histoire du secteur : c’est un moment de rupture qui affecte la totalité des associations et la totalité des donateurs et non pas seulement ceux de l’ARC.

Il y a un avant et un après scandale, à partir duquel les relations qu’entretiennent les donateurs et les associations ont changé de nature.

Aujourd’hui, les donateurs interrogés qualifient l’avant scandale d’âge d’or de la confiance. Auparavant, le système produisait lui-même l’effet de confiance dont il a besoin pour fonctionner. A partir du moment où l’on était une association caritative, on était honnête car désintéressé. A partir du moment où l’on était responsable d’une ONG, on méritait la confiance. La confiance était donnée, elle allait de soi. Le don était porté par cette relation de confiance.

Cette situation prend fin brutalement avec l’affaire de l’ARC. La situation qui en résulte est radicalement différente : il y a rupture de ce système de confiance.

Et c’est justement la conquête de nouveaux donateurs (5 à 6 millions de fidèles assurent cette manne) qui est remise en cause par cette perte de confiance.

« On constate que les donateurs traditionnels sont les moins sensibles à ces crises », explique Antoine Vaccaro de Non Profit. Ils continuent de donner car cela fait partie de leur culture personnelle et religieuse. La chute des recrutements de nouveaux donateurs apparaît beaucoup plus sensible puisqu’elle oscille entre 35 % et 70 %, suivant les causes et les organismes. »

L’effet perte de confiance a en outre été accentué par un contexte économique et politique particulier. L’euro a fortement changé la donne. Les périodes d’élection présidentielle – 1981, 1988 et 1995 l’ont déjà montré – ne sont également jamais favorables aux organismes faisant appel à la générosité.

Dernier paramètre qu’il ne faut pas négliger : l’absence de grande catastrophe internationale – qui ne manque jamais de susciter des dons – au cours des premiers mois de l’année 2002

3 Panel : 3 triades (entretiens de trois personnes) de deux heures : 3 triades de donateurs donnant depuis plus de 15 ans, 3 triades de donateurs donnant depuis 5 à 10 ans, 3 triades d’abandonistes à Paris et en Province.

Du point de vue du donateur, il y a une conséquence centrale : alors que donner c’était faire confiance, donner aujourd’hui c’est prendre un risque.

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