Une éventuelle responsabilité des ordonnateurs – Section II :
Le contrôle de la gestion opéré par les chambres régionales des comptes a une influence en terme de publicité ayant un impact politique par le biais de l’opinion publique mais les ordonnateurs sont responsables devant la cour de discipline budgétaire et financière créée à cet effet. Ainsi, la cour recevra transmission des affaires concernant les ordonnateurs (§ 1.) qu’elle pourra assortir de sanctions éventuelles (§ 2.). Cette étude s’oriente vers la cour de discipline, juridiction spécialisée dans le domaine de la responsabilité des ordonnateurs et n’envisagera pas les suites pénales que peuvent occasionnées le contrôle de la gestion.
Paragraphe 1 : La transmission à la CDBF et l’histoire de communication des documents
A côté de cette responsabilité politique induite par la publicité des rapports d’observations, les ordonnateurs sont responsables des irrégularités de leur gestion notamment lorsqu’elles portent atteinte à la régularité. « L’institution d’une cour de discipline budgétaire et financière répond au souci de ne pas laisser impunies les fautes de gestion des ordonnateurs, alors que les fautes des comptables se trouvent sévèrement sanctionnées à l’occasion du jugement de leurs comptes »177.
Plus particulièrement, la cour de discipline budgétaire et financière, instituée par la loi n° 48-1484 du 25 septembre 1948, visait, dans l’esprit du gouvernement Ramadier, à « sanctionner les fautes de gestion commises à l’égard de l’Etat et de diverses collectivités » par les ordonnateurs et, de manière plus générale, par les agents des organismes soumis au contrôle de la Cour des comptes. De plus, « sa préoccupation principale était d’empêcher les dépenses faites par l’administration en dépassements de crédits178 ». Cette idée montre un souci de préserver l’équilibre budgétaire mais aussi, par extension, de veiller à ce que les ordonnateurs aient pris toutes les diligences nécessaires pour dépenser mieux. Ainsi, la cour de discipline budgétaire et financière devrait sanctionner les fautes de gestion ainsi que les manquements ayant concouru à ces fautes. Enfin, elle apporte une grande innovation à l’irresponsabilité pécuniaire des agents publics.
En outre, les infractions punissables par la Cour de discipline budgétaire et financière sont plus des « fautes de gestion financière » que des fautes dans la gestion en tant que telles. A ce stade, une nuance peut être remarquée puisque la notion de « faute de gestion » retenue par la loi de 1948 répond à des critères larges car elle peut englober tant la faute dans le comportement personnel du dirigeant ou la faute dans l’exercice des fonctions. En effet, la chambre régionale des comptes lors de ses contrôles constatent des atteintes en terme de sincérité budgétaire179 mais aussi des négligences en terme d’études de faisabilité du projet180 par exemple. Ainsi, sont susceptibles d’être réprimé, une imputation irrégulière d’une dépense pour dissimuler un dépassement de crédits (la sincérité est en jeu), l’engagement de la dépense sans pouvoir ni délégation, infraction aux règles relatives à l’exécution des dépenses et des recettes…181
La chambre régionale des comptes dispose d’un délai de cinq ans à compter de la découverte des faits délictueux pour saisir la cour de discipline. Cette compétence de saisine directe, la chambre régionale l’a acquise de manière tardive devant auparavant recourir au parquet de la cour des comptes.
Toutefois, il apparaît relativement déplorable que la liste des personnes justiciables de la cour soit limitée selon les termes de la loi n° 88-13 du 5 janvier 1988 à tout représentant, administrateur ou agent des organismes soumis soit au contrôle de la Cour des comptes ou au contrôle de la chambre régionale des comptes. En effet, les élus bénéficient d’une certaine protection puisque sont exclus les présidents et vice-présidents des conseils régionaux et généraux, les maires et leurs adjoints ainsi que les présidents élus de groupements et de syndicats des collectivités locales. Toutefois, l’article 78 de la loi n° 93- 122 du 29 janvier 1993 a remédié à cette situation et a assujetti les élus à la cour de discipline dans des cas limitativement énumérés par la loi : lorsqu’ils ont engagé leur responsabilité propre à l’occasion d’un ordre de réquisition du comptable, non-respect des obligations de mandater ou d’ordonnancer la somme que la collectivité a été condamnée à payer par une décision passée en force de chose jugée ainsi que l’inexécution, totale ou partielle, ou retard d’exécution d’une décision juridictionnelle ayant provoqué la condamnation à une astreinte182.
A titre d’exemples, quelques rares cas peuvent être dénombrés mettant en cause un élu local. L’arrêt du 23 février 1994, SEM A. met en cause M.X183, adjoint au maire de la commune et président du conseil d’administration qui utilise ce qualificatif pour ne pas être justiciable de la cour de discipline budgétaire et financière selon les dispositions de l’article 1er de la loi du 25 septembre 1948 modifiée. Toutefois, dans cette espèce, il a été reconnu justiciable de la cour et sanctionné sur le motif d’avantages injustifiés184. Concernant cette notion d’avantage injustifié, cela concerne un avantage accordé à autrui en nature ou pécuniaire. L’inconvénient est de pouvoir chiffrer l’infraction. Dans ce cadre, le juge utilisera « la référence au prix du marché ou au juste prix, la référence à un prix de transaction antérieur, la décomposition du prix et la constatation de l’existence de commissions ou autre éléments étrangers majorant le prix 185». Cette infraction est réprimée et il n’est pas nécessaire que la personne ait prémédité son infraction.
Toutefois, la cour de discipline budgétaire et financière est sujette à un grand manquement au niveau de la législation et de son évolution. En effet, la loi du 21 décembre 2001 assigne notamment aux élus locaux la nécessité de fixer des objectifs afin que la chambre régionale des comptes puissent exercer un contrôle de manière qualitatif et plus aisément.
Or, l’intérêt principal de cette définition des besoins est bien le fait de pouvoir responsabiliser les gestionnaires sur les actions de politiques publiques qu’ils ont souhaité réaliser, sans porter atteinte au principe de l’opportunité. Par là même, il apparaît facile de mettre en évidence, en tout cas pour les magistrats des chambres régionales des comptes, un projet fixé à 2 millions et qu’au final les coût de ce même projet s’élève à 6millions et cela sans porter atteinte à l’utilité de la dépense publique.
De même, il est intéressant en cette matière de se référer à la loi organique du 1er août 2001 qui fixe une budgétisation par objectifs et prévoit notamment de responsabiliser les gestionnaires sur les programmes et les missions mises en œuvre. Or, à la lecture des rapports de Didier Migaud186 et d’Alain Lambert187, aucune sanction ne semble assortir cette responsabilité et ce n’est pas l’opinion publique qui va sanctionner un tel manquement !
Dons, selon cette réflexion, il apparaît qu’aussi bien au niveau étatique, que dans les administrations locales, les élus échappent à une responsabilité éventuelle, pourtant réclamée par les nouvelles lois.
De plus, la cour de discipline budgétaire et financière est caractérisée par une procédure rendant ses sanctions pratique
Lire le mémoire complet ==> (L’évaluation de l’efficacité de la dépense publique dans le contrôle de la gestion opéré par les Chambres Régionales des Comptes)
Mémoire de DEA – Mention FINANCES PUBLIQUES – Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales
Université Lille 2 – Droit et santé – Ecole doctorale n° 74
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