L’imposition fiscale chez le parraine résident français

L’imposition fiscale chez le parraine résident français

Section 2 – L’imposition de la recette financière chez le parraine

Les sommes versées par le parrain constituant des charges déductibles pour lui, entrent dans le patrimoine du parrainé et constituent à ce titre des revenus imposables. Plusieurs distinctions vont devoir être faites afin d’étudier l’imposition de cette recette financière chez le sponsoré. Tout d’abord ce dernier peut être une personne physique (§1) ou morale (§2) résident fiscal français ou étranger.

§1- LE PARRAINE EST UNE PERSONNE PHYSIQUE

Qu’il soit résident français (A) ou non résident fiscal français (B), le droit fiscal n’est pas indifférent à l’arrivée de cette nouvelle ressource financière chez le parrainé.

A- LE PARRAINE EST UN RESIDENT FISCAL FRANÇAIS

Définissons la notion de résident fiscal français(a) avant de distinguer le traitement fiscal de la recette selon que le parrainé ait la qualité de salarié (b) ou de travailleur indépendant (c). Distinction rendue nécessaire face au fait que le sportif ou l’artiste est fréquemment étranger ou vit à l’étranger. Les règles de la territorialité fiscale ne sont donc pas à exclure.

a) La notion de résident fiscal français et ses conséquences

En droit conventionnel on fait référence à la notion de résident fiscal, tandis qu’en droit interne on parle de domicile fiscal51. Ces deux notions désignent le même concept. Il s’agit d’un critère à partir duquel est déterminé l’Etat qui appréhendera les revenus d’une personne.

En droit Français, le domicile fiscal n’est pas une référence au domicile de la personne, ni à sa nationalité. Il s’agit du foyer de celle-ci, c’est-à-dire, le lieu où elle habite normalement et où se trouve le centre de ses intérêts familiaux. A défaut de pouvoir le déterminer ainsi, on se réfère à des critères subsidiaires tels que le lieu de séjour principal ou le contre de ses intérêts économiques. La méthode utilisée par la France est inspirée de la convention modèle de l’OCDE.

La notion de résidence fiscale est utilisée lorsque le contribuable risque d’être soumis à une double imposition. Les conventions fiscales prévoient une série de critères qui s’appliquent dans un ordre déterminé afin de désigner l’Etat qui appliquera sa législation fiscale au revenu en question.

Ces critères sont le foyer d’habitation permanent, le centre des intérêts vitaux en tenant compte des intérêts familiaux et économiques du contribuable, le séjour habituel. Celui de la nationalité n’est retenu qu’en dernier ressort52.

51 Article 4 du CGI

52 CE, 5 mars 1971, DF 1971, com. 1136 : cet arrêt illustre parfaitement l’application de ces critères conventionnels dans l’ordre de priorité. Le dernier ayant trouvé application étant donné l’inefficacité des premiers.

b) L’existence d’un contrat de travail

Le contrat de parrainage, sur le plan juridique, est soumis aux règles générales de la formation des contrats. Aucune législation, ni jurisprudence, n’impose un forme quelconque aux parties, qui en vertu du principe de la liberté contractuelle peuvent choisir celle qui leur convient. Par conséquent, il n’est pas rare de trouver des personnes parrainées ayant la qualification de salarié.

Cette qualité engendre, bien entendu, l’application des règles du code du travail audit contrat.

Il est ainsi courant que les cyclistes professionnels soient les salariés des groupes extra-sportifs qui les emploient, lesquels sont organisés dans le cadre du statut associatif par les entreprises commerciales qui ont décidé de pratiquer le parrainage dans le domaine du sport cycliste53. La relation salariale se caractérise principalement par un lien de subordination du salarié vis à vis de son employeur.

D’autres critères peuvent être retenus pour qualifier une telle relation. En effet, le critère de la subordination n’est pas toujours évident, certains salariés, dont font partie les parrainés, ne sont pas réellement soumis à leur employeur dans le cadre de l’exécution de leurs obligations, ils disposent d’une certaine autonomie.

Le juge n’est pas tenu par la qualification employée par les parties, et peut si la circonstance le permet donner une autre qualification au contrat. La jurisprudence analyse les circonstances de fait afin de redonner au lien contractuel sa véritable qualification.

Ainsi le fait que le parrain donne de consignes très strictes au parrainé qui ne peut s’en écarter, le fait de le soumettre à des horaires précis, la durée du contrat, l’exclusivité de la collaboration, le programme des activités auquel s’engage le parrainé, sont autant de signes qui permettent de retenir une telle qualification juridique.

53 H. LENA, op. cit. n°1

Dès lors que la qualification de contrat de travail est retenue par les parties ou, le cas échéant, par le juge, la rémunération financière perçue par la parrainé est qualifiée da salaire. Sur le plan fiscal, le parrainé est soumis en principe aux règles d’imposition des revenus salarié des personnes physiques. La recette entrera dans la catégorie des traitements et salaires et contribuera à la détermination de l’impôt sur le revenu dû par le parrainé-salarié.

Cela ne soulève pas de grandes difficultés théoriques ou pratiques. Les règles habituelles s’appliquent.

Il faut en outre mettre en lumière les particularités tenant à certaines catégories de salariés. Notamment les artistes du spectacle.

Le code du travail pose une présomption de salariat concernant cette catégorie de professionnels. L’article L 762-1 alinéa 1 dispose « tout contrat par lequel une personne physique ou morale s’assure, moyennant une rémunération, le concours d’un artiste du spectacle en vue de sa production est présumé être un contrat de travail dès lors que cet artiste n’exerce pas cet activité, objet de ce contrat, dans des conditions impliquant son inscription au registre du commerce.

Cette présomption est cependant simple, elle peut être combattue par la preuve contraire. Cependant, le code spécifie, à l’alinéa 2 du même article, que toutes les preuves ne sont pas admissibles. Ainsi, le mode de rémunération, la qualification donnée par les parties à leur relation, le fait que l’artiste conserve sa liberté d’expression de son art ou qu’il soit propriétaire du matériel utilisé et qu’il emploie lui-même une ou plusieurs personnes pour le seconder dès lors qu’il participe personnellement au spectacle ne sont pas de nature à faire tomber la présomption de salariat de ces professionnels54.

54 Soc., 30juin 1988, D. 1989, Somm. 164, obs. P. FIECHI-VIVET; Soc, 1er oct. 1992, Dr. trav. 1992 n°11, p. 6

L’alinéa 3 du texte précité fournit par ailleurs une liste non limitative des personnes considérées comme artistes du spectacle. Il s’agira «notamment » des artistes lyriques, chorégraphiques, dramatiques, des artistes de variétés, du chef d’orchestre.

En leur qualité de salarié, ces artistes du spectacle percevront une rémunération qui sera qualifiée de salaire. Cette rétribution peut provenir d’une opération de parrainage telle que définie plus haut.

Le code général des impôts permet à cette catégorie de professionnels soumis au régime de la déclaration contrôlée d’opter pour le régime d’imposition étalée de leur rémunération institué par l’article 100 bis en ce qui concerne « les bénéfices imposables provenant de la production littéraire, artistique ou scientifique ». L’imposition est alors établie sur la base de la moyenne de leurs recettes de l’année d’imposition et les deux ou quatre années précédentes. 55

La personne parrainée peut agir aussi à titre indépendant.

c) Le travail indépendant

La personne parrainée peut s’engager à organiser ou à participer à la manifestation concernée, et à accomplir les obligations relatives à la promotion de l’entreprise, moyennant une rémunération convenue, tout en conservant son autonomie, son indépendance juridique.

Dans ce cas, elles se placent, non pas dans le cadre d’une relation contractuelle de travail, mais dans celui du travail indépendant . Le contrat ainsi conclu prend le caractère d’un contrat d’entreprise. Le parrainé aura la qualité de prestataire de service. Aussi bien sur le plan du droit du travail que sur le plan fiscal cette qualification n’est pas sans conséquences.

Le travail indépendant est une catégorie résiduelle ; en l’absence des critères permettant de retenir la qualification de contrat de salarié, le travail, la prestation entre dans le cadre du travail indépendant. En 1994, le législateur a institué une présomption de non-salariat à l’égard des personnes qui se sont immatriculées à la sécurité sociale en qualité de travailleur indépendant.

Cette présomption était simple et pouvait être renversée dès lors qu’il était établi que l’activité des intéressés les plaçait « dans un lien de subordination juridique permanent » à l’égard du donneur d’ordre. La loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail, dans le but de lever les ambiguïtés posées par cette présomption, la supprime.

55 H. LENA, op. cit. n°1

Au niveau du droit du travail, le travailleur indépendant ne bénéficie pas des avantages légaux dont est titulaire le salarié, avantages dont la contrepartie est la subordination. A l’inverse il n’est pas subordonné, et par conséquent, est soumis à un régime moins protecteur vis à vis de son cocontractant.

Sur le plan fiscal, le même constat s’impose. Les revenus perçus à l’occasion de l’opération de parrainage par le bénéficiaire seront soient qualifiés de bénéfices industriels et commerciaux, soit de bénéfices non commerciaux.

La somme perçue par le bénéficiaire sera qualifiée de BNC ou de BIC en application des critères retenus par le droit fiscal. Il s’agira d’un bénéfice industriel et commercial, lorsque la personne exerce une activité commerciale. Les profits réalisés doivent résulter d’une activité professionnelle, c’est-à-dire, d’une activité permettant la réalisation d’opérations industriels ou commerciaux pour son propre compte et à but lucratif.

Dans ce cas, le bénéficiaire sera soumis à certaines obligations comptables et déclaratives56. Il pourra en ce cas être soumis au régime normal57 ou au régime simplifié58, à mois de préférer adhérer à un centre de gestion agréé.

56 doc. adm. 4F 1111, 1er décembre 1993

57 doc. adm. 4G 331,15 mai 1993 : le régime normal est le régime de droit commun appelé aussi régime du bénéfice réel auquel sont soumises les sociétés qui relèvent de l’IR dans la catégorie des BIC ou de l’IS dès lors qu’elles réalisent un certain chiffre d’affaires.

58 soumission de plein droit aux entreprises dont le chiffre d’affaires ne dépasse pas un certain montant. Néanmoins, ces entreprises peuvent opter pour le régime normal, ce qui engendre des obligations comptables plus lourdes.

La catégorie des BNC, est résiduelle. Lorsque les sommes concernées ne peuvent entrer dans aucune autre catégorie, elles entrent dans celles des BNC.

Pour être imposable au titre des bénéfices non commerciaux, les sommes concernées doivent avoir le caractère de revenu. Au sens du droit fiscal, cela signifie que la source de ces profits soit susceptibles de renouvellement.

Cette définition aurait eu pour effet d’exclure de cette catégorie la plupart des sommes dont la source se trouve dans une opération de parrainage . mais la jurisprudence fiscale n’est pas aussi stricte en ce domaine. En effet, les revenus ayant un caractère occasionnel ou accidentel, peuvent entrer dans la ladite catégorie. Cette précision revêt une certaine importance, car les opérations de parrainage ont plus un caractère événementiel que mensuel.

Un arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes en date du 19 octobre 199559, admet l’imposition un titre des BNC, les profits réalisés par un navigateur à la suite d’une victoire dans une course de voiliers, nonobstant la circonstance qu’il n’aurait effectué qu’une seule course au cours de l’année d‘imposition.

Dans tous les cas les règles habituelles s’appliqueront.

Encore faut-il souligner la particularité des coureurs automobiles.

Lorsque la prestation exécutée par le coureur constitue une action de parrainage (promotion de l’image de marque de l’entreprise parrain), l’administration la qualifie, à priori, de bénéfices industriels et commerciaux.

Néanmoins, un tempérament peut être apporté ; ces revenus peuvent entrer dans la catégorie des bénéfices non commerciaux lorsque le parrainé accepte d’être imposé sous une côte unique à ce titre pour l’ensemble de ses revenus professionnels et que les opérations à caractère commercial qu’il a accomplies sont directement liées à l’exercice de l’activité non commerciale et constituent le prolongement de cette dernière60.

59 n°93NT 00576, 1ère chambre

La question qui s’est parallèlement posée par rapport à cette réponse CAILLE, fut celle des sommes perçues par les salariés en sus de la rémunération prévue dans le contrat de travail ayant pour objet une action de parrainage.

Ces sommes devaient être revêtir le caractère de bénéfices commerciaux ou bien alors pouvait-on appliquer le principe posé dans la réponse CAILLE, c’est-à-dire permettre au salarié d’être imposé sous une même cote dans la catégorie des traitements et salaires. L’administration est restée muette sur ce point, de même concernant les tribunaux.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
La fiscalité du parrainage en France
Université 🏫: Université DE PARIS NORD-(Paris XIII)
Auteur·trice·s 🎓:
JESUS-FORTES BILLE

JESUS-FORTES BILLE
Année de soutenance 📅: Diplôme d’Etudes Approfondies DROIT DES AFFAIRES - 2000- 2001
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