Le facteur managérial et la réussite du Leveraged Buy-out

Le facteur managérial et la réussite du Leveraged Buy-out

E. Le facteur managérial

La réussite du LBO suppose l’établissement d’une convergence d’intérêts entre les investisseurs financiers et le management de la cible. Une communauté d’intérêt réelle et pérenne ne peut raisonnablement être affirmée que dans le cadre d’un co-investissement de l’ensemble des parties.

Il faut savoir motiver, impliquer mais également sanctionner un management qui du fait des caractéristiques propres aux sociétés éligibles aux opérations de levier n’est généralement pas accoutumé à être mis sous pression sur des périodes relativement longues.

Le problème ne se pose bien entendu pas dans les mêmes termes suivant la nature des opérations, c’est ainsi que la réaction du management ne pourra être identique suivant que l’on traite d’un LBO, d’un LBI ou d’un BIMBO et encore moins d’un MEBO.

1. Fondements théoriques de l’implication du management

Le socle de la théorie développant le raisonnement selon lequel « les coûts d’agence des fonds propres proviennent des conflits d’intérêts entre les actionnaires et les dirigeants » a été élaboré en 197669 par Jensen et Meckling.

69 « Theory of the firm : managerial behaviour, agency cost and ownership structure”, Journal of Financial Economics (3,1976)

Lorsque le dirigeant est le détenteur de la majorité voir de l’intégralité des actions de la société, celui ci assume l’intégralité des conséquences de ses actions et décisions, que celles ci soient bénéfiques ou non pour la société. C’est généralement le cas des PME familiales. Dans le cas de sociétés où l’ équipe dirigeante est distincte de l’actionnariat, on observe alors une tendance du management à détourner à son profit une partie des excédents de la société sous forme d’avantages divers (aménagements divers, voitures, frais de représentation exagérés, avions de sociétés… l’actualité récente et les déboires de Vivendi Universal ont mis au grand jour ce type de pratique confiscatoire) .

Enfin et surtout, les firmes arrivées à maturité génèrent des flux de trésorerie abondants qu’elles ne savent pas investir dans des conditions de risque / rentabilité équivalente à l’activité qui les a généré.

On pourrait penser que cette situation se prête à une augmentation de la part de dividende versée aux actionnaires. Dans la réalité, on observe une rétention des cash flow générés, conduisant à la génération de véritables « trésors de guerre » non motivés par des perspectives d’investissement rentables. Le management répugne à mieux rémunérer les actionnaires.

Tout se passe comme si le management se constituait une assurance envers les accidents industriels et autres retournements conjoncturels. L’abondance de ressources génère au mieux une politique laxiste et au pire à des essais de diversification de la firme en dehors du métier qu’elle maîtrise. C’est ce qu’on appelle le coût d’agence des fonds propres, puisqu’il caractérise la différence de valeur entre deux sociétés exerçant la même activité mais dont la rigueur de gestion des managers est divergente.

Les possibilités dont dispose un actionnariat très dispersé pour maîtriser ce genre de dérive sont limitées. Le coût d’agence des fonds propres peut être réduit en substituant de la dette à une partie des fonds propres.

Cette substitution s’opère de manière particulièrement nette dans le cadre des opérations de LBO dont les sociétés éligibles ont des caractéristiques tendant à leur conférer des coûts d’agences importants (activité mature, trésorerie accumulée importante, occasions d’investissement rares).

2. Enjeux et problématiques

Parallèlement aux conditions propres à l’opération (garanties, prix, modalités financières et covenants bancaires) est initiée une négociation propre au management en vue de l’établissement d’un «management package ».

Le «management package » consiste en un ensemble contractuel définissant :

  • * Les modalités d’investissement du management.
  • * Le statut du management.
  • * Les principes de corporate governance qui régiront l’action des dirigeants de la société cible.

Une des principales difficultés de ce type de négociation réside dans le timing et l’échéancement des diverses opérations. Il est effectivement difficile d’envisager la conduite d’une négociation relative au « management package » tandis que les négociations avec les vendeurs ne sont pas totalement achevées (prix, dispositions financières …).

Le premier enjeu de la négociation réside dans la fraction du capital allouée au management. Cela suppose donc de définir la quotité et le niveau d’investissement requis par le management. Il est généralement admis une norme moyenne d’une année de pleine rémunération.

L’objectif final doit être la constitution d’un niveau d’implication de chacune des parties qui soit suffisamment significatif pour effectivement lier ou tout au moins faire converger leurs intérêts. On imaginera aisément qu’il ne peut être aucunement dans l’intérêt d’un investisseur financier, et par extension des autres prêteurs et financeurs que le management qui constitue le moteur de l’opération ne puisse être en mesure d’exprimer la totalité de ses ressources en vue de maximiser la valeur de la cible tout en assurant le financement de la dette holding, ce qui revient strictement au même.

Il est d’usage de penser que les risques du projet sont mieux appréciés et partagés lorsque les managers investissent également dans l’opération de LBO. Il n’est pas tant question d’astreindre les dirigeants à des exigences d’investissement élevées de type de nantissement personnel, mais selon la pratique générale, un nantissement de 6 à 24 mois de salaire pour un manager salarié et la participation du plus grand nombre de salariés à la réussite du LBO, via un plan d’épargne entreprise.

3. Outils et principes de négociation.

De la même manière que l’investisseur financier est avant tout motivé par la maximisation de l’effet de levier dont il peut bénéficier, la motivation du management, est optimisée par l’association de sa participation à un effet de levier qui lui est propre.

Un des dispositifs les plus fréquemment usités est l’« equity kicker ». Il s’agit d’un mécanisme de déclenchement par pallier en fonction de la réalisation de certaines conditions (principe du « ratchet mechanism ». Ce mécanisme, en cas de sur performance est relutif pour le management. Il peut évidemment être combiné à un mécanisme dilutif en cas de sous performance, c’est à dire de non atteinte des objectifs assignés au management.

La performance du management est mesurée en fonction de la performance interne de l’activité ou de la valorisation atteinte par la société.

Le risque de ce type de procédé de motivation est l’hyper focalisation du management sur les problématique de court terme. On peut alors introduire une série de clauses dites de « catch up » dont le but est d’apprécier des performances lissées permettant de mesurer les conséquences des décisions manageriales sur des périodes excédent un seul exercice.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
Université 🏫: CNAM PARIS DESS Finance d'Entreprise - Chaire de Finance du Professeur Denis DUBOIS - Spécialisation Finance d'entreprise
Auteur·trice·s 🎓:
Virginie PHAM

Virginie PHAM
Année de soutenance 📅: Mémoire présenté pour l'obtention du DESS Finance d'entreprise - 2001-2031
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