La trajectoire scolaire des étudiants chinois en France

La trajectoire scolaire des étudiants chinois en France

3.2 Processus d’orientation et trajectoire scolaire des étudiants chinois

Au travers des histoires biographiques de nos enquêtés (voir Tableau 5), nous nous intéressons aux questions suivantes : comment s’orientent ils vers telle ou telle filière de formation ? Les projets scolaires et professionnels influent-ils sur le choix des études ? Quels sont les facteurs qui déterminent ou influencent leur trajectoire ?

Tableau 5 Trajectoires universitaires de 15 enquêtés

Trajectoires universitaires de 15 enquêtés

3.2.1. En France, les possibilités de choix des disciplines et des établissements

En France, une réorientation se fait facilement. Comment les Chinois utilisent-il cette liberté que l’université leurs accorde ?

Pour les étudiants chinois venant poursuivre leurs études en France, la question de les accepter dans tel cycle d’études se pose. Les gouvernements chinois et français ont signé un accord de reconnaissance de diplôme, un benke (Bac+4) en Chine équivaut au niveau maîtrise (bac+4) en France. L’accord au niveau international ne sert que pour référence, l’établissement supérieur en France ayant son autonomie dans le recrutement des étudiants et dans l’élaboration des critères de recrutement.

Certains étudiants ont choisi leurs filières avant de venir en France par l’intermédiaire des agences. Ces dernières ont tendance à baisser leur niveau d’études dans le but d’obtenir une préinscription plus facilement. Ka, garçon qui avait un Bac+4 en Chine et un an d’expérience professionnelle, a été accepté par une inscription en Licence 3 dans la même filière. C’est la même chose pour Chen. La plupart de nos enquêtés ne demandent pas la raison de cette dégradation. Ils croient souvent que les universités parisiennes ont plus d’exigences à cause du nombre des candidats. Par rapport aux universités chinoises qui recrutent sur les résultats au concours national, les critères de recrutement à l’université française ne sont pas clairs à leurs yeux.

Certains concluent que les critères de recrutement sont liés pour la moitié aux compétences linguistiques et à la connaissance de la matière étudiée, pour l’autre moitié à la « chance » de chacun. Liu se dit « chanceuse », elle a eu la licence (bac+4) en droit en Chine. Ayant été refusée par une faculté de droit dans une ville au sud pour l’inscription en Master 1, elle a été acceptée en même temps par la faculté de droit pour une inscription en Master 2 dans une autre ville.

Cette dégradation du niveau est mal acceptée par certains étudiants. Wei, a eu une Licence (bac+4) en design d’intérieur d’une université prestigieuse à Shanghai (Fu Dan). Elle a été admise en première année de licence dans une école privée de design après une année d’apprentissage du français. L’école dit que cette dégradation est due à ses lacunes en français. Elle ne croit pas à cette explication.

Se considérant suffisamment compétente dans son domaine, elle pense que l’école fait exprès de baisser le niveau d’entrée pour gagner plus d’argent (les frais d’étude sont de 6600 euros par an).

3.2.1 Du projet scolaire au projet professionnel

Nous avons développé dans le chapitre précédent la motivation et le projet de départ des étudiants chinois : beaucoup d’entre eux sont venus en France pour acquérir un diplôme, pour repousser les échéances professionnelles et avoir une expérience à l’étranger. Cependant au moment de leur venue, la plupart de nos enquêtés n’ont pas de projet d’études précis.

Leur première préoccupation était de pouvoir s’inscrire à l’université française et d’obtenir le visa pour venir.

Ceci est plus remarquable chez les étudiants commençant leurs études en France. Comme une préinscription dans des formations spécialisées est obligatoire avant de venir en France, ils ont fait leur choix de filière d’une façon aléatoire, marquée fortement par l’influence de leurs parents et par l’agence intermédiaire. Pour l’étudiant lui-même, ses projets d’études n’étaient pas réellement affinés.

Ces projets se construisent et se modifient au cours de leurs études, comme dit Qin « Je n’avais pas non plus de projet concret sur ce que je voulais étudier et ce que je voulais faire comme métier, je me suis dit qu’un projet s’établirait une fois que j’aurais plus d’informations. » Dans cette perspective, on pourra alors parler comme F. Dubet de « projet scolaire ».

Cela peut être également vrai pour certains étudiants qui viennent compléter leurs études dans le but de repousser les échéances professionnelles. La crise de l’emploi en Chine conduit les étudiants à viser un diplôme de niveau plus élevé, plus valorisant socialement et économiquement. De plus, certains craignant d’entrer dans la vie active cherchent avant tout la protection du campus et du statut d’étudiant.

Dans ce cas là, ils n’ont pas un projet d’étude précis avant de venir en France. Ils peuvent continuer ou non leur cursus commencé en Chine.

3.2.2 Un projet d’études et professionnel à affiner au cours des études

Nous avons d’abord des étudiants commençant leurs études en France. Yu est venue en France après le lycée. Après dix mois d’apprentissage du français à DU Paris 5, elle a commencé sa formation spécialisée : la première année de licence en français langue étrangère (FLE). Elle est actuellement en deuxième année de licence. Il y a trois ans et demi, elle a choisi cette spécialité « au hasard ».

Pendant la période d’apprentissage du français, elle n’a pas eu suffisamment d’informations pour confirmer son goût ou pour se réorienter. Au bout d’un an de formation, elle se rend compte que ce n’est pas la formation qu’elle souhaite. Très tard, elle envisage de continuer jusqu’à Licence et de se orienter ensuite vers une autre spécialité après Licence, pour « ne pas perdre du temps ».

R : Quand j’ai décidé de venir étudier en France, je n’ai pas éprouvé d’intérêt pour telle ou telle filière de formation. Je croyais avant tout à l’importance de la langue française. Je me suis dit : il me faut d’abord bien maîtriser le français, on verra par la suite. C’est vraiment au hasard que j’ai choisi cette formation FLE.

Q : Comme ce choix s’est-il fait ?

R : C’était par l’agence intermédiaire. Cette dernière, nous a donné une liste de spécialité à choisir.

Q : Et après dix huit mois d’apprentissage en français, tu as décidé d’apprendre cette iscipline?

R : Je n’ai éprouvé ni une détestation de cette discipline, ni envie de l’apprendre ou d’apprendre d’autre matière.

Q : Et maintenant ?

R : Maintenant, j’ai envie de changer de spécialité. Parce qu’ils visent à former les futurs professeurs de français, les cours proposés sont très théoriques, je n’envisage pas de faire le métier de professeur.

Si je me réoriente vers les sciences économiques ou vers les mathématiques, il me faut recommencer par licence 1. Je ne veux pas perdre de temps. J’ai bien réfléchi. Je voudrais bien maîtriser le français et passer le concours pour entrer dans une école d’interprétation et de traduction. Je voudrais bien être interprète ou traductrice.

Xiao s’est considérée chanceuse à ce titre. Elle a suivi seulement six mois d’apprentissage et s’est inscrite ensuite en première année de licence en FLE. Au milieu du deuxième semestre, elle sait qu’elle échouera cette année. Par contre, elle ne regrette point cette année perdue en FLE. Parce qu’elle gagne du temps et épargne de l’argent par rapport à ceux qui ont suivi un an et demi de langue dans le DU et s’inscrivent ensuite dans la spécialité.

Ces derniers ont d’abord payé cher en terme de temps (un an et demi) et d’argent pour la formation (4500 euros). Ensuite, une fois inscrit dans la formation universitaire (Licence 1), ils se rendent compte que cette spécialité ne les intéresse pas ou n’est pas abordable pour eux. Nombreux ont échoué leur première année et recommencent la première année de licence dans une autres filière ou dans une autre université, encore un an de perdu.

Pour elle, elle considère cette année en FLE comme un an d’apprentissage de français, mais elle paie dix fois moins cher (seulement les frais d’inscription) et n’apprend pas moins.

Elle se dit chanceuse, parce que « Le plus important, je me suis rendu compte que cela ne m’intéresse pas après avoir suivi des cours. Je préfère les langues appliquées et voudrais travailler comme représentante commerciale d’entreprises; ce métier exige qu’on parle couramment plusieurs langues. Je vais déposer ma candidature aux départements de langues appliquée comme la Sorbonne et Paris 7. »

Les étudiants critiquent vivement le système éducatif en Chine dans lequel les dispositifs d’information sur l’orientation n’existent pas. Ce manque est considéré comme la cause principale de leur difficulté. Comme dit Yu « En Chine, après le gaokao, on choisit aveuglément sa formation professionnelle et on cherche du travail selon la formation reçue.

En France, il me semble qu’on cultive depuis le lycée l’orientation vers différentes professions, ce qui fait que la plupart des Français savent ce qu’ils veulent faire. Et donc l’ordre est différent : on choisit sa formation selon ce qu’on souhaite faire comme métier. »

Qin dit « Personne ne t’aide à t’orienter en Chine. Tu ne reçois pas d’informations précises sur la manière dont vont se dérouler tes études, ni sur les débouchés professionnels qui te seront offerts à la fin de celles-ci. C’est pourquoi il y a tant de chômage chez les jeunes diplômés chinois, parce qu’ils n’ont pas un projet d’études et un projet professionnel à leur entrée à l’université. »

On constate que ces étudiants chinois n’ont pas reçu d’orientation après leur venue en France. Qin a fait sa formation de français en province. Au moment de choisir une formation universitaire, elle a reçu les informations sur les filières universitaires par un Chinois en Master MIAGE qu’elle a connu par internet.

Celui-ci a eu beaucoup d’influence dans sa décision, elle a dit « par la connaissance d’une personne, j’ai fait connaissance avec une filière ». Apparemment, elle a été convaincue par les idées de ce garçon « emploi d’abord, vocation après ».

Quant à Yu, le choix s’est fait en Chine, au moment de la préinscription à la formation universitaire. Ce choix s’est fait d’une façon aléatoire. Les informations et les orientations ne sont pas fournies. Les agences intermédiaires ont un but commercial et elles ferment les yeux sur l’intérêt des étudiants et leur parcours universitaire. Elles prétendent qu’une réorientation peut s’effectuer une fois arrivées en France.

Cependant, la plupart de nos enquêtés n’ont pas osé par crainte d’un refus, comme dit Chen (F), au bout de dix huit mois d’apprentissage, « on a envie de changer de spécialité, mais on ne cesse de répéter : notre niveau de français est si mauvais qu’on va nous refuser », ou comme dit Song ( G) « Pendant la période d’apprentissage du français, je n’ai eu aucune connaissance concernant la spécialité, je ne pouvais pas dire si j’aimais ou non.

C’est après l’entrée dans la formation que je l’ai découverte petit à petit. ».

Existe-il des dispositifs d’orientation au sein de l’université, les étudiants chinois sont-ils au courant ? Yang a bien fait sur ce point « En fait, à Lyon 2, il y a un centre où on peut se renseigner pour tous genres de questions. J’y suis allée : j’ai été en droit en Chine, dans quelle spécialité puis-je m’inscrire en France ? On m’a répondu : tu peux t’inscrire en sciences de l’éducation en M1, en sciences d’économie en L3, droit en Master 1. ».

Elle s’est renseignée ensuite auprès des étudiants chinois s’inscrivant dans ces filières recommandées pour avoir une idée précise du déroulement des études, des difficultés à affronter en tant qu’étudiante étrangère.

3.2.3 Le projet professionnel l’emporte sur la vocation : le cas des étudiants dans les filières scientifiques

Les étudiants n’hésitent pas à choisir des filières scientifiques dont la sélection est plus sévère. Une fois diplômés, ils trouvent plutôt facilement un emploi dans un marché international du travail.

Qin était dans la filière littéraire au lycée en Chine. Soucieuse de son futur « trouver un emploi après les études et gagner l’indépendance», elle fait un choix très aventureux : s’inscrire dans la filière typiquement scientifique : les mathématiques. « Je suis d’accord avec cet étudiant chinois.

Il faut choisir en priorité un emploi plutôt qu’un métier, c’est-à-dire il faut trouver du travail après les études, il faut être indépendant vis-à-vis de ses parents. Je voudrais choisir une spécialité qui me garantit un travail après mes études. Pour cela, il faut maîtriser une technique, un savoir-faire. ».

Pour les étudiants venant poursuivre leurs études, certains profitent de cette occasion pour s’inscrire dans une formation dont les diplômés sont très demandés sur le marché du travail. XIE, une fille de 25 ans, après cinq ans d’études en médecine en Chine, est actuellement en Master 1 en informatique appliquée à la médecine à l’Université Paris 5.

Elle a choisi cette formation selon le métier qu’elle souhaite. « Je souhaiterai pourvoir un jour devenir cadre dans une entreprise internationale et diriger une équipe. Sûrement, je devrai commencer par la poste en bas et petit à petit devenir cadre.

Pour cela, il faut que je maîtrise une technologie, j’ai choisi donc cette formation. Pendant ma formation, je cherche toutes les occasions de faire des expériences dans des entreprises. Il y a peu de temps j’ai trouvé une entreprise parisienne qui m’a acceptée comme apprentie. Pour ce travail, je ne serai pas rémunéré, mais serai récompensée par l’acquisition des savoir- faire, l’expérience, quoi. »

Chou continue sa spécialité en ingénierie biologique, même s’il juge que cette formation ne l’intéresse pas vraiment, mais qu’elle permet de trouver un travail en Chine ou en France. Il envisage de faire une thèse.

Q : As-tu pensé à changer de spécialité après l’apprentissage du français ?

R : Je n’ai pas eu cette nécessité. Pourquoi changerais-je de spécialité alors que mon cursus en Chine correspond totalement à ma formation en France ?

Q : Ton intérêt pour tes études?

R : Non, je ne suis pas intéressé par ma spécialité, pas beaucoup intéressé, si je dis la vérité. Q : Pas beaucoup intéressé ?

R : Tu n’as pas perçu que dans un pays comme la Chine, une fois diplômé, tu ne trouves pas un travail qui correspond à ta formation reçue ? Je ne sais pas si c’est pareil en France ou non. Je sais qu’en France, une fois diplômé, on peut trouver du travail dans ce domaine.

Dans cette perspective, tu choisis une spécialité, ta préoccupation majeure est l’accès à l’emploi, n’est ce pas ? Dans le choix de la formation, la priorité doit être accordée à la possibilité de trouver du travail. La possibilité de trouver un travail stable l’emporte sur l’intérêt des études.

3.2.4 L’harmonisation du rapport aux études : les étudiants dans les filières scientifiques

Song a également choisi sa spécialité actuelle d’une façon aléatoire. « J’ai voulu étudier les sciences d’économie et de finances et mes parents qui travaillent dans ce domaine m’ont beaucoup influencé sur ce choix.

Mais l’agence intermédiaire m’a dit : tu as une note élevée dans le concours, la spécialité de Sciences d’économie est vraiment banale en France et très simple. Mieux vaut que tu choisisses une spécialité qui est un challenge pour toi, j’ai choisi donc la spécialité actuelle : biomédical. ».

Au bout d’un an, Song a pu non seulement affirmer son intérêt intellectuel pour sa formation universitaire, mais aussi affiner ses projets. « Après quasiment un an d’études, je peux dire qu’elle est intéressante.

Je crois pouvoir réussir cette année et voudrais continuer jusqu’au niveau du doctorat. Je souhaite travailler comme enseignante-chercheur.». Il s’est renseigné par le biais d’internet et a profité de l’expérience d’anciens étudiants, ce qui lui a permis d’établir ses projets scolaires et professionnels : son projet d’études est détaillé jusqu’à ses difficultés éventuelles, son déroulement et le financement de chaque étape.

Yang est actuellement en L2 en Mathématiques. Issue d’une famille aisée, dont les parents sont cadres privés, elle s’est dite beaucoup influencée par sa mère, qui travaille comme expert-comptable. Elle aime les mathématiques depuis l’enfance. Elle dit « les savoirs et savoir-faire en gestion peuvent être acquis dans le travail, même dans la vie quotidienne, par exemple, je suis conseillère de mes parents dans l’investissement.

Par contre, on doit suivre une formation universitaire pour les sciences de la matière. Il est donc mieux de connaître une technique pour le marché du travail ». Elle a également un projet d’études bien établi.

Dans les cas de Yang, Song, les trois dimensions du rapport aux études (projet, vocation et intégration) trouvent leur harmonisation.

3.2.5 La facilité d’obtention du diplôme ou la vocation ? Les cas des étudiants en Sciences Humaines

Dans la filière littéraire, comment les étudiants chinois ont-ils fait leurs choix ? Et quel est leur projet ? Nous avons six enquêtés : cinq filles et un garçon. Les données de deux entretiens réalisés en 2007 dans le cadre de mon mémoire master 1 sont également employées.

Nous avons remarqué deux tendances dans le projet des étudiants. La première tendance, c’est le choix par sa facilité : facilité d’inscription parce que dans ces matières les candidats sont relativement peu nombreux; facilité de validation des cours et d’obtention du diplôme.

Wei est en France depuis deux ans et demi. En Chine, elle était en Licence 2 en anglais, après un an et demi d’apprentissage du français, elle est actuellement en Licence 2 en sociologie. Elle a choisi la sociologie à cause de sa forte chance d’être admise dans cette filière où il n’y a pas beaucoup de candidats. Ce choix a été fait en Chine au moment de présenter sa candidature pour une préinscription à l’université française. « Je suis passée par l’agence intermédiaire.

Cette dernière nous a donné une liste des spécialités. Déjà, les choix sont plus limités pour les élèves de la filière littéraire que pour ceux de la filière scientifique. J’ai réfléchi : science d’économie, il y a beaucoup d’étudiants qui ont choisi ces filières, donc la concurrence est très forte entre eux. Je préfère choisir une spécialité où il y a moins de candidats et donc moins de compétition.».

Li est en France depuis quatre ans. Elle a eu une Licence (bac+4) en droit en Chine, mais elle s’est orientée vers les Sciences de l’Education et a commencé par la Licence 3 à Paris après une année d’apprentissage du français à Lyon. Elle n’osait pas continuer un master en droit, à cause de la sélection forte dans cette filière. « Faire le droit en France? Non, c’est trop difficile, j’ai entendu parler de l’échec massif des étudiants français en droit.

C’est vraiment une filière très sélective. Ayant peur de l’échec, les Chinois n’osent pas s’inscrire en droit. Comme mon niveau de français est très mauvais, je n’ai pas le courage de continuer le droit en France. » Elle s’est réorientée vers les Sciences de l’éducation, mais elle ne savait pas à ce moment là ce qu’était cette spécialité, « il me semblait qu’elle débouchait vers le métier de professeur.

Je me suis dit : c’est bien d’être professeur ». Mais elle l’a choisi plutôt par sa facilité de validation des cours : « parce que l’on m’a dit qu’elle était parmi les spécialités universitaires où l’on passe relativement facilement les examens.

J’ai cherché sur internet les facultés de sciences de l’éducation en France. J’ai déposé ma candidature à une dizaine de facultés. J’ai été acceptée par ma faculté actuelle à Paris. ».

Quel pourrait être le projet d’études et professionnel à la suite de ce choix ? Cette nouvelle discipline suscite chez eux un grand intérêt et le sentiment de « découvrir » de « nouveaux savoirs ». Yang confirme que sa spécialité est intéressante qu’elle a pu « apprendre de nouvelles choses », même si elle n’arrive à comprendre les cours qu’à moitié. Elle est très assidue aux cours : « je viens à chaque cours, en réalité, j’ai envie d’apprendre.

Même si je suis paresseuse et que j’ai d’énormes difficultés en français, j’espère pouvoir apprendre un peu plus dans chaque cours.». Elle a eu le diplôme de Licence 3 en deux ans et est actuellement en Master 1. Consciente de sa difficulté, elle envisage de redoubler un master 1 également « je ne suis pas pressée ».

Dans leurs propos, les étudiants de filières de sciences humaines ont beaucoup plus de difficultés d’accès à l’emploi, d’où vient l’hésitation de nos enquêtés entre le projet d’études et leur projet professionnel. A la question « veux-tu encore devenir professeur ? », Yang a répondu : « J’hésite.

Si je rentre en Chine, je peux trouver un travail comme professeur. Si je reste en France, c’est très difficile à trouver du travail avec cette formation. J’hésite beaucoup maintenant, je me suis dit : il faut que je m’oriente vers les sciences économiques ?

Une autre tendance dans les filières de sciences humaines est le choix par vocation. Certains étudiants déclarent avoir choisi leurs études en fonction d’un intérêt intellectuel.

Cheng, une fille qui avait fait deux ans en français dans son pays natal et deux ans en Relation International dont un an à Sciences Po Paris, s’est orientée vers l’économie sociologique en s’inscrivant en Licence 3 à Paris 1. Selon elle, l’intérêt personnel domine ce choix : elle souhaite se forger une connaissance profonde et solide en sociologie d’économie.

Nous avons remarqué également ce choix par intérêt pour les étudiants du deuxième cycle, souvent à la suite d’une réorientation. Wang est un garçon qui a eu une Licence (Bac+4) en Science d’économie dans une université prestigieuse à Shanghai (Fu Dan).

Une fois arrivé en France, il s’est inscrit en Master 2 littérature à Paris 3 et en Master 1 à l’EHESS en Sociologie d’économie. Ce changement de goût s’est fait à l’université en Chine, d’un côté, il a suivi le cursus en sciences économiques et en a eu le diplôme. Mais il critiquait

vivement l’approche qui domine la science d’économie en Chine : des théories se basent essentiellement sur les mathématiques. D’un autre côté, il a découvert la littérature, dont il a fait un double cursus, a un diplôme secondaire en littérature et a également publié un article dans une revue académique sur la littérature américaine. (Issus de données 2007).

Ces étudiants ont un projet d’études plus ferme dans l’espoir de pouvoir continuer jusqu’au niveau de doctorat et de travailler dans le monde universitaire et de la recherche.

3.2.6 La facilité d’apprentissage et la facilité d’accès à l’emploi ? Le cas des étudiants en Sciences économiques et de gestion

Un tiers des étudiants chinois s’inscrivent en sciences économiques et de gestion. Pourquoi cette filière est si « prisée » par les Chinois? Il faut revenir au contexte en Chine pour comprendre leur choix. Dans un contexte de l’ouverture de la Chine vers l’économie de marché, les sciences d’économie comme discipline ont été modernisées et fortement développées depuis la dernière décennie.

Une fois diplômés, les étudiants trouvent facilement un travail relativement « bon ». En Chine, c’est une discipline qui recrute à la fois les Bacheliers de filières scientifiques et ceux de filières littéraires. Pour les derniers qui ne souhaitent pas faire une formation en lettre, les sciences économiques sont leur meilleur choix.

Aux yeux de nos enquêtés, cette filière est marquée par sa facilité d’apprentissage d’abord et facilité d’accès à l’emploi ensuite. Wang a fait les sciences d’économie à une prestigieuse université à Shanghai. Il explique sa logique du choix.

« R : on disait que c’était un parcours facile, donc j’ai choisi ce parcours là (et il a été admis.)

Q : Qu’est ce que tu entends par « facile » ?

R : Par rapport aux spécialisations scientifiques, celle-là est moins dure (facile à apprendre). Par rapports à d’autres spécialisations en Sciences Sociales, celle là permettrait de trouver un travail beaucoup plus facilement. »

L’influence des parents est considérable, en particulier pour les étudiants commençant leurs études. Nos enquêtés dans cette filière mentionnent souvent que les parents ont décidé avec eux le choix de filière. Chen est en Licence 3 en ressources humaines,

« Q : Avais-tu un projet d’études ou un projet professionnel avant de venir ?

R : Oui, mais ça restait très flou. Je pensais à ce moment là, j’apprends une langue étrangère de plus, je pourrais trouver un travail dans des entreprises aux capitaux étrangers en Chine. Quelle spécialité ? Je n’ai pas réfléchi là-dessus vraiment. Mon père m’a conseillé les ressources humaines ou la gestion.»

Tang a fait une Licence (bac+4) en comptabilité en Chine. Au moment de l’orientation, elle avait voulu faire une filière littéraire, ses parents insistaient pour qu’elle choisisse des filières de sciences économiques. Elle a finalement écouté ses parents. Une fois arrivée en France, elle continue une spécialité en gestion à Paris 13.

« Q : Tu t’intéresses à ta spécialité ?

R : Ca va. Certains camarades français abandonnent cette spécialité après un an, parce qu’ils ne l’aiment pas et se réorientent vers d’autres spécialités. Pour les Chinois, une fois qu’ils commencent, s’ils ne détestent pas cette manière, ils souhaitent continuer jusqu’à bout. Q : Comment perçois tu l’avenir?

R : C’est difficile de trouver un travail en France. En fait, ma spécialité vise plutôt la gestion que la technique dans la banque. Il y donc peu de cours en comptabilité, mais beaucoup d’apprentissage et de théorie. Comme le droit, ça casse la tête. »

Après un an d’études en France, les étudiants se sont beaucoup informés sur les formations et le marché du travail en France.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Expérience des étudiants chinois en France : mobilité et intégration
Université 🏫: Université Paris Descartes – Paris V - Faculté des Sciences Humaines et Sociales – Sorbonne
Auteur·trice·s 🎓:
LIU Ziqin

LIU Ziqin
Année de soutenance 📅: Mémoire de Master Recherche - 2008-2009
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