Conditions techniques de diffusion en ligne des œuvres musicales

Conditions techniques de diffusion en ligne des œuvres musicales

Partie 1

L’élaboration d’une protection technique des œuvres musicales diffusées en ligne

Chapitre 1

La justification juridique des mesures techniques de protection

Section 1
La menace de la piraterie numérique et des réseaux de peer to peer

A. Les nouvelles conditions techniques de diffusion des œuvres musicales

Afin de cerner précisément les enjeux qui ont mené à l’introduction des DRMS et mesures techniques de protection dans notre droit interne, il convient d’aborder brièvement les conditions techniques de la copie dans l’ère du numérique. C’est en effet au regard de l’environnement technique dans lequel elle évolue que la copie doit s’apprécier juridiquement.

La numérisation d’une œuvre musicale implique sa traduction dans le langage binaire de l’informatique. L’objet de la numérisation d’une œuvre est donc de représenter le signal analogique, le son, par une suite de 1 et de 0. Ainsi, contrairement à la copie analogique, la copie numérique n’est pas une reproduction distinguable de l’original. La copie numérique est l’original, c’est-à-dire son double numérique parfait ou encore son clone.

Plus précisément, il faut distinguer la copie numérique d’un support original et la copie numérique d’une œuvre compressée. Si la première copie implique en effet une perte de qualité lors de la compression, peu perceptible pour l’oreille humaine, la seconde copie reproduit à l’identique le fichier. Ainsi, lorsqu’une œuvre est mise à disposition sur l’internet, elle est nécessairement compressée, et toutes les copies qui en seront faites seront des clones de cette œuvre. Il est toutefois envisageable que, à l’avenir, les œuvres diffusées sur l’internet soient identiques à l’original. En effet, la compression a pour objet de faciliter la circulation des fichiers, mais lorsque les vitesses de connexion atteindront un niveau élevé, la taille des fichiers mis à disposition pourra être plus grande, et donc de meilleure qualité.

Partant, la notion de copie et surtout sa traduction juridique, l’exception pour copie privée, prennent une tout autre dimension. D’un point de vue musical, la copie numérique implique un confort sonore identique à un original. Il s’agit donc d’une avancée technologique d’un degré autre que ce qu’avait connu jusqu’ici l’industrie de la musique qui, dès l’apparition des cassettes audio, s’était inquiétée des conséquences de la copie sur son économie.

Les enjeux relatifs à la numérisation des œuvres musicales sont à la fois économiques, sociaux et juridiques. Ces trois sphères se trouvent, en effet, affectées par les nouveaux modes de diffusion en ligne. En faisant éclater des compromis sociaux établis de longue date, l’internet conduit à une remise en cause généralisée des droits d’auteur. Le volet moral du droit d’auteur, n’est cependant pas autant affecté que le volet patrimonial.

En effet, l’œuvre numérique peut être signée, le droit au nom et à la paternité de l’œuvre n’est donc pas affecté. Mais le droit de repentir subit une mutation du fait de la densité des connexions qui rend irréversible le passage dans la sphère publique sur le réseau. Ainsi que l’expliquent Françoise Benhamou et Joëlle Farchy1, c’est surtout le « droit à l’intégrité » qui se trouve affecté.

D’un point de vue patrimonial, l’existence de l’internet modifie profondément les usages. Nombre d’internautes perçoivent l’aspect patrimonial du droit d’auteur comme une forme dépassée à l’heure de la société de l’information. Mais pour les auteurs et les producteurs, la diffusion généralisée des œuvres musicales, sans restriction (peer to peer et piraterie), sur les réseaux, constitue une atteinte majeure à ce droit patrimonial.

L’enjeu de la protection des œuvres musicales dans la société de l’information est donc de trouver un équilibre entre les attentes des utilisateurs, qui aspirent à un accès toujours plus élargi à la culture, et les besoins légitimes des ayants droit d’obtenir une juste rémunération. La principale conséquence juridique de la copie numérique parfaite et de sa circulation libre sur les réseaux a trait à la contrefaçon.

En effet, la numérisation implique le clonage et donc la contrefaçon rapide et à grande échelle des œuvres. C’est sur ce terrain là que le droit a commencé à se préoccuper des rapports entre droit d’auteur et l’internet. La pierre angulaire est la notion de copie privée de l’article L. 122-5-2° du Code de la propriété intellectuelle, une exception au droit patrimonial de l’auteur.

L’article dispose que l’auteur ne peut, lorsque l’œuvre a été divulguée, « interdire les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective ». C’est donc au regard du champ d’application de l’article L. 122-5-2° que doivent s’apprécier les difficultés créées par la diffusion illégale des œuvres musicales.

Cette diffusion illégale a été facilitée par plusieurs facteurs dont la baisse des coûts de stockage et l’augmentation de la puissance de calcul. Mais, l’arrivée, dans une grande partie des foyers, de l’internet haut débit, à partir de l’année 2002, et le développement concomitant du phénomène du peer to peer sont les causes principales.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Diffusion en ligne des œuvres musicales : protection technique ou contractuelle ?
Université 🏫: Université Paris 1 Panthéon – Sorbonne
Auteur·trice·s 🎓:
Simon BRIAND

Simon BRIAND
Année de soutenance 📅: Master 2 Droit de l’internet - 2006 – 2007
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