Spécialisation des acteurs plus poussée, le marché du viager

Spécialisation des acteurs plus poussée, le marché du viager

Une spécialisation des acteurs de plus en plus poussée

Après l’apparition de nouveaux produits, le deuxième mouvement de financiarisation du viager consiste en une spécialisation de plus en plus fine des acteurs.

Spécialisation rendue nécessaire par l’essor du marché, et les innovations en termes de limitation des risques liés au viager.

L’apparition de fonds d’investissement viagériste

Tous nos interlocuteurs ont souligné la pertinence d’un développement de fonds d’investissement viagériste dans le contexte actuel et ce pour quatre raisons principales.

* Le marché du viager est un marché au potentiel immense, et donc bien adapté à l’apparition de structures de masse telles que les fonds d’investissement. L’un de nos interlocuteurs, fondateur d’un des tous premiers fonds souligne ce point.

« Il est difficile d’avoir des données fiables sur le marché. C’est aujourd’hui un marché de niche mais c’est un marché en pleine expansion et son potentiel est monstrueux puisqu’il concerne tous les retraités propriétaires. »

Un autre interlocuteur remarquait que le viager est une solution d’avenir car il ouvre de nouvelles perspectives de revenu aux personnes âgées. « les sénior ont en réalité trois types de revenus, elles n’ont conscience que des deux premières.

  •  La retraite traditionnelle, issue de l’épargne et gérée pour l’Etat par des instituts parapublics.
  •  La retraite complémentaire, qui s’est largement développée depuis les années 1990, « on épargne pour soi »
  •  La retraite patrimoniale, constituée d’un patrimoine immobilier à « liquidifier ». »

C’est dans ce contexte que la création de fonds comme structure de masse du développement du marché est pertinente voire nécessaire.

* Du côté du vendeur, le passage par un fonds est aussi avantageux puisqu’il résout le problème fondamental du face à face morbide entre deux individus dans le cadre de la vente viagère.

« Quand vous avez un acheteur qui est un fonds d’investissement qui achète plusieurs centaines de biens tous les ans, le raisonnement de l’acheteur est d’abord un raisonnement statistique, c’est-à-dire qu’il n’est pas intéressé par le décès précoce d’un vendeur particulier.

Si vous avez un particulier, vous prenez un risque sur un bien, et celui-ci devient énorme parce qu’il n’est pas diversifié, vous êtes donc naturellement poussé à souhaiter le décès du vendeur.

Dans notre cas de figure, la transaction est totalement dépersonnalisée, nous avons des effets de masse sur plusieurs centaines d’individus, on raisonne d’un point de vue mathématique, mais dépourvu de considérations morbide » explique très justement l’un de nos interlocuteurs

* Du côté acheteur, il est très logique de développer des fonds puisque le marché du viager est un marché dominé par la demande.

« Il y a en effet aujourd’hui plus d’offre que de demande, pour des raisons conjoncturelles (crise financière), mais aussi structurelle, à savoir l’importance du risque pesant sur l’acheteur, et enfin des complexes moraux à acheter en viager ».

L’idée des fonds est donc « d’attirer sur ce marché de nouveaux types d’investisseurs, qui sont les investisseurs institutionnelles, banques, compagnies d’assurance, mutuelles, qui ont par ailleurs déjà investi dans l’immobilier, principalement de bureau, mais qui se diversifient vers le résidentiel à cause de la crise ». L’arrivée d’un surcroît de demande avantage les vendeurs en rehaussant les prix.

* Enfin, les fonds d’investissement assurent de juteux bénéfices aux institutionnels, qui se protègent bien mieux contre le risque que les particuliers, par l’existence de portfolios de viager. Une démarche somme toute similaire aux SCI et autres portfolios immobiliers depuis longtemps rentrés dans les mœurs.

L’exemple de Koesio

Le fonds a été crée en septembre 2009, et est l’un des premiers fonds viagéristes. Il a plusieurs rôles principaux

D’abord de servir d’interface entre les investisseurs institutionnels et les vendeurs. « être actif sur le marché du viager exige une certaine expérience, et une spécialisation. Ces compétences n’existent pas encore parmi les institutionnels qui ont de toute façon tendance à externaliser leurs investissements immobiliers »

Le fonds travaille donc avec différents acteurs. Les agences, les notaires, des cabinets d’actuaires, les vendeurs, les sociétés de réassurance et enfin les institutionnels, auxquels il délivre des portfolios clé en main.

L’évaluation et le partage du risque sont ses principales compétences et repose sur une juste évaluation des biens, contrôlée par des tiers, et l’externalisation du risque chez les compagnies de réassurance.

L’élaboration de ses propres barêmes actuariels est au cœur de la structure, Koesio étant sceptique sur la pertinence des barêmes de l’INSEE pour le marché du viager notamment concernant le risque d’antiséléction décrit précédemment.

Le barême Daubry des notaires ne fait pas plus sens puisque « ce n’est pas réellement un barême actuaire »

Enfin le fonds se fixe à moyen terme l’objectif de lancer des campagnes de publicité ciblée visant à rehausser la connaissance et l’image du viager parmi les vendeurs potentiels.

La structure semble être très dynamique puisqu’en moins d’un an, elle compte déjà une quinzaine de membres et compte de « gros investisseurs institutionnels » parmi ses clients.

L’apparition des premiers fonds témoigne de la maturité et du dynamisme du marché et constitue une première au niveau international, ce qui révèle la particularité du marché Français du viager.

Le développement d’autres acteurs de plus en plus intégrés

Les produits de réassurance en viager se développent également.

Les réassurances permettent à l’acheteur de payer comptant en un seul montant, bouquet et rente. La réassurance se charge alors de payer les rentes en l’échange de frais de dossiers et de taux d’intérêt liés au risque de dépassement des prévisions.

Ce type de produit permet donc la division du risque en deux parties, le risque lié à l’allongement du temps de versement de la rente, supporté par la réassurance, et le risque d’allongement de la durée d’occupation du bien, qui demeure supporté par l’acheteur.

Certains cabinets d’actuaires offrent désormais des compétences plus poussées de conseil auprès des viagériste et des fonds afin d’établir des barêmes et des taux réalistes et spécifiques au viager.

On peut ainsi représenter de manière graphique la multiplicité des acteurs, et leur imbrication.

Spécialisation des acteurs de plus en plus poussée, marché du viager

Cette augmentation des spécialisations, couplée à une croissance du nombre d’acteurs montre que le marché du viager entre dans une logique de système.

On est en effet passé en l’espace d’un demi siècle d’un fonctionnement de marché où le viager se faisait principalement par le biais de notaires dont ce n’était qu’une activité parmi d’autre, à une branche de l’immobilier où des professionnels, les « viagéristes » se consacrent exclusivement à la vente du viager et se font conseiller par des tiers.

L’apparition récente de fonds fait entrer une nouvelle catégorie de clients, les investisseurs institutionnels, dans le secteur.

Cette spécialisation suppose aussi une professionnalisation de la profession. Professionnalisation souhaitée par plusieurs de nos interlocuteurs qui ont parfois dénigré l’amateurisme de certains de leurs confrères.

Comme le soutient l’un d’eux, « le viager exige des compétences évidemment immobilières, de vente, mais également actuarielles, ainsi que de solides capacités de suivi après vente. »

C’est dans cette optique que Michel Artaz a par exemple fondé l’Institut Privé du Viager, pour répondre à une demande de formation aux spécificités du secteur, et notamment de formation continue des acteurs actuels.

Conclusion

On a donc compris que le viager est, au sein du secteur immobilier, sans doute un marché plus dépendant que d’autres à de nombreux facteurs environnementaux.

S’il a connu un franc succès au XIXe siècle auprès des ménages à petit budget, il a progressivement décliné avec l’essor des retraites. Aux cours des années 1980, lorsque l’inflation était élevée et que l’importance des prix et des taux d’intérêts rebutaient les investisseurs, il a connu un regain d’intérêt.

Au cours des années 1990, qui a vu les taux d’intérêts et l’inflation fondre, le viager à vu son attrait s’émousser. Ce n’est donc pas structurellement que le viager est un type de produit inadapté, mais il est bien plus tributaire de son environnement économique.

De plus, les racines de l’essor actuel du viager ne sont pas seulement de nature économique. Des considérations démographiques et sociologiques en font un produit d’avenir.

Le vieillissement de la population, les incertitudes sur les systèmes de retraite, l’importance du taux de propriétaire chez les séniors, et le poids crucial de l’immobilier dans le patrimoine dans un contexte de prix immobiliers très élevés, font du viager une source de revenus considérables à un moment où des besoins nouveaux se font ressentir.

Pour la société dans son ensemble, le viager est une solution avantageuse, puisqu’il permet d’éviter l’inoccupation des biens dans un environnement de pénurie de logement, ainsi qu’un soulagement des maisons de retraites.

Côté vendeur, le viager permet de répondre à la délicate question du maintien à domicile, étant entendu qu’on vit toujours mieux chez soi. Il autorise les personnes âgées demeurer financièrement autonome, ainsi qu’à liquidifier leur patrimoine afin de préparer et de faciliter leur succession.

Côté acheteur, le viager est une opportunité de financer sa propre retraite, comme le souligne Michel Artaz « le Viager pourrait devenir une nouvelle forme de retraite par capitalisation, en achetant un viager jeune, on capitalise pendant sa vie active, puis l’on recueille les fruits de cette capitalisation au moment de la retraite,[…],37 soit en occupant le bien, soit en cédant cette fois le bien acquis en viager ».

Le viager est aussi un mode de transaction qui se démarque par sa souplesse, vu la multitude des types de contrats de viager et les possibilités de réassurance, il autorise de fixer le curseur « risque/profit » de manière très précise, c’est pourquoi il constitue donc un investissement idéal.

Le marché du viager est un marché dont la croissance reflète son adaptation aux besoins de la société Française. En forte croissance, c’est un marché au potentiel considérable. Pour autant, le plein développement du viager demeure conditionnel et reste tributaire d’actions collectives de ses acteurs.

Il s’agit d’abord de lever les préventions du public à l’égard du viager, dont la vision persiste à être faussée par une série de clichés et de complexes.

Il est crucial de médiatiser les avantages que le viager peut apporter au vendeur, à l’acheteur, mais également à la société toute entière, de manière à lever le « le frein moral » que nous avons décrit dans notre deuxième partie.

Le viager demeure par ailleurs mal connu du grand public, sans doute serait-il judicieux que les professionnels du secteur d’accordent avec les pouvoirs publiques pour mener une politique d’information.

Le rôle des jeunes notaires est ici fondamental, car les nouvelles générations de notaires semblent souffrir d’une méconnaissance du viager issue de la complexification et de la professionnalisation du secteur. Or les notaires occupant une position de conseil privilégiée auprès des séniors, leur mission d’information est d’autant plus critique.

Un troisième enjeu est la diffusion du viager sur l’ensemble du territoire. Actuellement, le viager reste un marché confiné aux zones géographiques à prix élevés, le developpement du viager passe par son étalement géographique et la popularisation de son accès.

Ce processus est d’ailleurs en cours, avec la multiplication actuelle des acteurs du secteur, et l’apparition des premiers fonctionnements en réseau national (soit intégrés, soit par partenariat).

Un quatrième enjeu est de reconnaître l’aspect dyssimétrique de la vente. En effet, le Privilège du vendeur conjugué à la clause résolutoire font peser tous les risques sur l’acheteur.

Cette situation dissuade les banques d’accorder un crédit à ceux qui ne peuvent pas assurer le bouquet initial, puisque la possession d’un viager ne semble pas comporter de garanties suffisantes.

« Sans remettre en cause la nécessaire protection dont doit jouir le vendeur, une réflexion pourrait être engagée pour imaginer les dispositifs susceptibles de faciliter la levée du crédit à l’achat en viager ».38

Une limitation des risques pour l’acheteur est un mouvement qui est en cours dans le marché, car les viagéristes tentent de développer des viagers comme le viager libre, plus avantageux pour un primo accédant.

De même l’apparition des produits de réassurance joue aussi un rôle salvateur dans la réponse à cette problématique.

Un élargissement du marché à d’autres types d’acheteurs est aujourd’hui également fondamental. Puisque les acheteurs personnes physiques sont moins nombreux que les vendeurs, ne faut-il pas encourager les personnes morales à s’engager sur ce marché dans une logique d’investissement.

L’avantage de l’ouverture du marché à des sociétés d’investissement est double, d’une part une dissolution du « risque unitaire » de par la loi des grands nombres, d’autre part la levée du frein moral à l’achat. L’apparition actuelle de fonds d’investissement viagéristes s’inscrit dans cette démarche et témoigne d’une saine évolution du marché.

Enfin force est de constater que le viager est actuellement une solution très française, des facteurs culturels et économiques poussent en effet les pays anglo-saxons à favoriser des solutions de prêts hypothécaires plutôt que de se tourner vers des ventes en viager, au demeurant pratiquement inconnues dans ces pays.

Dans le reste de l’Europe, les pays latins que sont l’Espagne et l’Italie semblent posséder une meilleure connaissance du viager mais les conditions économiques de ces pays le rendent peu adapté, le marché n’y connait pas le degré de spécialisation du marché Français.

37 Viagers, Régime Juridique et Fiscal. Michel Artaz, Delmas Edition.

38 Le Viager Immobilier en France, Rapport du Conseil Economique et Social, Corinne Griffon, page 63

Deutsche Zusammenfassung.

Der « viager » ist eine Französische Art von Immobilienaustausch, wo der Käufer kauft ein Recht zum Erbe. Der Preis wird definiert in zwei Teile. Ein „bouquet“ , d.h. ein Kapital, der wird zuerst zu dem Käufer gegeben, und eine Rendite, die wird bis seinem Tot bezahlt werden. Der Kapital entspricht nur eine begrenzte Teil der gesamten Preis, generell etwa 20%, und die Rendite wurde entsprenchend der Inflation definiert.

Es gibt eine Vielzahl von Vorteile für den Verkäufer, die in diesen Diplomarbeit betrachtet werden. Unter anderem es gibt die Möglichkeit der Wohnung zu benutzen, und sein Lebenstil zu bewähren.

Es gibt auch eine Vielzahl von Vorteile für den Käufer, die auch detailliert werden. Unter anderem, die Möglichkeit eine Wohnung billiger zu kaufen.

Der Viager war einmal eine sehr normale Art von Austausch, insbesondere in der XIXen Jahrhundert, wann es noch keine offensichtliche Versicherung und Rendite System. Er wird im Laufe der XXen Jahrhundert immer noch seltener. Jedoch wurde er seit eine Dekade wieder zu Leben gegangen, dieser Markt wurde zwischen 2005 und 2008 gedoppelt. Das Ziel dieses Diplomarbeits ist diese neue Leben von dem Viager zu erklären.

Dieser Diplomarbeit ist in drei Teil gegliedert. Zuerst die Verständis von den verschiedene Art von Viager, die Vor und Nachteile dieses Austauschs für Verkäufer und Käufer, und die Geschichte der Viager. Dann die Grenze dieser Art von Austausch, und zum Schluss die zukünftige Aussicht.

English Summary.

The viager is a French kind of real estate transaction, in which a right to inheritate is actually bought by the purchaser. The price is separated in two parts, the “ Bouquet”, i.e, the capital which is to be paid at once when the transaction takes place, and a fix income, paid monthly to the seller until he dies.

They are many advantages to this transaction for the seller, they were approached in this Mémoire, among others, the possibility of keeping the right to use his apartment while maintaining his lifestyle is a crucial point.

They are also many advantages for the buyer, among others the opportunity to access to property easily and cheaply.

The viager was once a very common way of exchanging real estate goods, in particular in the XIXth century, when there was no national stately borne retirement plans. In the course of the XXth century it has gone into decay. Surprisingly, this market is now enjoying a vivid revival. The market size has doubled between 2005 and 2008. The purpose of this study is to find the reasons for this sudden revival and to determine if it is going to last.

The study is divided into three parts. First understanding what is a viager and the different forms of contracts that this topic embrace, as well as the pro’s and con’s for both parties. Then explaining the limit to this kind of transaction, and finally see the outlooks of the viager.

Parce que le viager est une solution d’avenir pour la France, la profession se spécialise, le nombre d’acteurs et les types de métiers liés à ce marché augmentent, et une logique de système se met en place, qui permettra sans doute, par les transferts de connaissance qu’elle suppose, de répondre aux exigences que nous avons détaillées.

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