La publicité des marques sur Second Life en temps réel

Raconter la marque Second Life en temps réel : la publicité

C. Raconter la marque en temps réel : la publicité

Nous l’avons vu dans la deuxième partie, la première des opportunités que les marques ont commencé à exploiter est la possibilité de mettre en scène en temps réel, la narration de la marque soit de construire un message publicitaire.

Les meilleurs testimoniaux que nous en avons vus sont les machinimas, ces vidéos tournées sur le métavers qui sont des miroirs de ce qui se vit sur ces mondes au même titre que le cinéma pour le monde réel.

Le machinima est l’outil asynchrone qui permet de construire des fictions à l’intérieur des métavers pour en faire usage à l’extérieur.

Si les marques veulent s’intéresser aux résidents, elles peuvent faire la même chose en temps réel.

Comme dans la vraie vie, cela s’appelle du théâtre. « Le néomarketing opère un glissement sémantique subtil » explique Christian Salmon : « il transforme la consommation en distribution théâtrale.

Choisissez un personnage et nous fournissons les accessoires. Donnez-vous un rôle, nous nous occupons du décor et des costumes »128.

128 Christian Salmon, Storrytelling, ibid, p. 42

Ainsi nous témoignons à travers l’expérience d’Elise Lovenkraft que le métavers est le lieu d’une nouvelle consommation, comme nous l’avons dit, des nouveaux centres commerciaux qui sont de véritables centres d’attraction.

Le métavers est un puissant outil pour construire la narration de la marque.

La « scénarisation » que permet l’immersion dans la 3D est une véritable aubaine pour les professionnels du Marketing qui savent si bien raconter des histoires « publicitaires ».

La publicité des marques sur Second Life en temps réel

Dans un monde réel où le consommateur voit 1000 messages publicitaires par jour (2000 aux Etats-Unis), les marques n’ont aujourd’hui plus d’autre choix pour se démarquer que l’instantanéité, la transparence, la présence sur tous les médias interactifs, non seulement par le média le plus puissant : le bouche à oreille mais aussi par un marketing de l’expérience qui passera par les métavers et la pratique du Marketing narratif (ou storytelling).

Ces « histoires » contribuent, nous l’avons vu avec Cetelem et Europ Assistance à forger la narration de la marque.

Toucheront-elles à terme l’inconscient du consommateur qui se cache derrière l’avatar ?

C’est ce qu’enseigne Christian Salmon qui n’hésite pas à parler de « formatage des esprits », en tant que but du marketing narratif et du néomarketing.129

129 Christian Salmon, Storrytelling, Ibid, p.42.

Les études opérées sur les avatars incitent à penser que cela est possible dans la mesure où la démarche s’inscrira dans la durée.

Il ne faut pas douter que les comportements dans ces mondes gagneront l’adhésion du plus grand nombre car dans le monde virtuel comme dans le monde réel, notre consommation s’enracine dans la théorie mimétique : il nous faut consommer comme les autres.

Conclusion de la troisième partie – Du mix des 4P au mix des 4 C sur Internet

En guise de conclusion de cette partie nous reprendrons à notre usage la définition du Marketing des 4 C traditionnellement associés à une démarche marketing dans les services et l’appliquerons à l’univers des métavers.

1. C comme client à la place du P de Produit

Il est maintenant plus facile de faire l’analogie entre service et métavers puisque l’objet virtuel est en lui-même un service. On ne s’éloignera jamais de l’objet virtuel car c’est lui qui permettra de toucher le client et de viser la personnalisation.

Ronald Boucher explique que la personnalisation est en fait la matérialisation du service (le Produit est réintroduit dans cette matérialisation)

En « one to one » à travers l’expérience : il s’agira de faire participer le client, voire le faire travailler à la place de l’entreprise pour simplifier les procédures (idée force de Ronald Boucher).

Pour reprendre son exemple, la gestion d’un compte bancaire effectué par un client autonome, via internet coûte moins cher que la même prestation en agence, effectuée par du personnel salarié.

Le responsable marketing aura soin d’instrumenter le besoin d’interaction des résidents pour coopérer avec ses clients ou prospects et les fidéliser de façon à les habituer à effectuer par eux-mêmes des tâches qui coûtent plus cher à l’entreprise lorsqu’elles sont effectuées par un personnel salarié.

Sur un métavers, nous avons vu que la marque pouvait tirer profit de l’immersion tridimentionnelle et de l’instantanéité pour faire vivre une expérience forte au client à travers une théâtralisation de l’échange. Reste à savoir quelles actions et quelles transactions spécifiques pourraient bien avoir lieu sur un métavers mieux que dans le monde réel.

En « one to many » : la personnalisation peut aussi prendre la forme de l’appartenance à une communauté. Et c’est encore là le lieu idéal pour un marketing des communautés qui s’exprime à travers les groupes, comme nous l’avons démontré.

2. C comme Coût à la place P de Prix

Un des phénomènes les plus troublants sur Second Life est le phénomène de la micro- économie qui conditionne en grande partie l’activité sur un monde virtuel.

La marque aura alors deux façons de se positionner à des fins commerciales.

Elle peut, soit utiliser le métavers comme un canal de distribution et commercialiser des services de la première vie via le métavers, soit inventer des services qui rencontreront les besoins des résidents.

Dans le premier cas, il est envisageable d’offrir un avantage tarifaire.

Proposer une politique de remise pour les personnes passant par ce canal de distribution : d’une pierre deux coups, la marque fidélise son client en le traitant en VIP et promeut le média qui lui permet de re- matérialiser le service.

C’est la politique que pratique le Trésor Public lorsqu’il offre une réduction de 20 euros aux contribuables qui déclareront leurs impôts sur internet, (la direction des impôts a tout intérêt à automatiser le processus de la déclaration).

En tant que repère sur le marché de la vraie vie, la marque profitera de sa notoriété et de son expertise pour sécuriser la transaction et apporter ici un service qui rencontrera vraiment la demande des résidents.

Dans le deuxième positionnement, la marque proposera des services qui rencontreront une demande sur un métavers.

Et quelque soit le faible volume de vente, sur le principe de la longue Traîne de Chris Anderson, ces besoins pourraient bien représenter dans l’avenir une part de marché égale ou supérieure à ceux (les besoins) qui ont émergé avec les progrès du Web2.0 sur les pages web.

Il faudra pour cela attendre quelques années que les progrès technologiques démocratisent les usages et renforcent donc la fréquentation des métavers.

Quoi qu’il en soit, ce sont les marques pionnières qui ont misé sur le long terme et qui se seront donné la peine d’observer les usages sur un métavers qui tireront alors leur épingle du jeu.

3. C comme Confort au lieu du P de Place

Sur internet, on parle d’interface ergonomique ; sur des métavers, il faudrait parler de création d’environnement en 3D, suffisamment accueillant pour que l’avatar ait envie d’y rester.

Mais c’est sans doute aussi le lieu pour une « servuction » qui tirerait profit des effets de simulation créant aussi de la sensation et de l’émotion, pour une consommation hédoniste.

La technologie étant liée au confort des résidents d’un métavers, la marque peut aussi jouer un rôle d’assistance auprès des ces prospects ou clients.

Une démarche initiée de façon originale par nos deux marques mais qui n’est restée qu’au stade embryonnaire. Des partenariats sont alors envisageables pour aider à palier les difficultés de navigation dans ces nouveaux environnements qui freinent encore trop le développement de ces « places ».

Philip Rosedale a avoué au cours d’une interview donnée le 25 avril 2008130 qu’aujourd’hui, 90 à 95% des personnes qui créent un compte sur Second Life ne restent pas.

130 Interview retranscrite par l’agence Community Chest sur le site de SLCamp, en français et en anglais : http://slcamp.wordpress.com/2008/05/05/philippe-rosedale-a-paris-transcription-25-avril-2008/

4. C comme Communication à la place du P de Promotion

Nous l’avons vu, avant de tenter une action marketing en direction des résidents d’un métavers, une action de communication peut servir de levier d’innovation pour l’image de la marque, il conviendra donc de privilégier l’événementiel et de le bien relayer via la blogosphère.

Que l’on vise les médias ou les résidents, on ne saurait se priver de jouer sur les effets de modes et de mimétisme qui se jouent dans les « tribus » – sur les mondes virtuels comme réels – où il faut être vu et avoir participé à des actions annoncées dans des blogs.

C’est là une caractéristique du marketing des communautés d’exploiter ce qui se joue sur les réseaux sociaux où il convient de « se montrer », et d’utiliser le puissant outil de la recommandation qu’on l’appelle marketing viral ou buzz. Une communauté virtuelle ayant les mêmes affinités, l’effet communautaire est garanti, enseigne Ronald Boucher.

Enfin, rappelons qu’à travers ce que nous avons appelé la théâtralisation de l’échange, la marque a l’opportunité de raconter de belles histoires en images et en trois dimensions.

Le Marketing narratif comme nous l’avons dit du Marketing expérientiel tient là un bel outil d’expérimentation pour raconter des visions d’un monde de plus en plus complexe.

« Le marketing narratif s’avoue comme une entreprise de synchronisation de « visions du monde » (…) qui se réconcilient sur la grande scène du marché mondial. L’acte de consommer devient alors un exercice de communication, voire de communication planétaire »131 explique Christian Salmon au sujet de la discipline du Storytelling.

Il se trouve que par coïncidence cette discipline est née dans les années 90 au même moment que le réseau des réseaux Internet.

Dans un contexte où il est de plus en plus difficile de démêler le vrai du faux, le réel, de la fiction, cet art narratif qui « plaque sur la réalité des récits artificiels »132 en stimulant les émotions pourrait bien trouver dans les métavers, tout comme le marketing expérientiel, un champ d’expérimentation et d’application aussi illimité que la géographie des mondes virtuels.

Conclusion générale
I. Réponse à la problématique

En quoi investir un monde virtuel peut-il contribuer à créer ou renforcer un lien entre une marque de services avec ses cibles dans le monde réel ?

A. Europ Assistance et Cetelem : deux expériences de marques récompensées

Tout au long de ce mémoire, nous nous sommes attachés à décrire et analyser en quoi Europ Assistance et Cetelem avaient toute légitimité à tenter l’expérience d’un métavers comme Second Life qu’elles ne connaissaient pas et avec lequel elles partageaient par leur essence de marque de services, des caractéristiques fondamentales que sont l’immatérialité, la simultanée et la participation.

Que l’on juge illusoire ou non le service qu’elles ont apporté aux résidents du monde virtuel, il ne fait aucun doute que dans leur action, elles ont su tisser avec leurs cibles de la première et de la seconde vie, des liens qui ne demanderaient qu’à être prolongés par une stratégie autre que communicationnelle, c’est-à- dire une stratégie de marketing des communautés.

Leur expérience sur Second Life aura notamment permis de construire leur identité de marque et d’asseoir leur réputation en véhiculant, outre leur esprit d’innovation, leurs valeurs intangibles, celles qui justement les démarquent parmi toutes les autres.

Leurs démarches qui s’inscrivent dans les nouvelles pratiques du Web 2.0 étaient à la fois, suffisamment originales et exemplaires pour faire l’objet d’une étude attentive, c’est du moins ce que nous avons pensé lorsque nous avons choisi ces deux là parmi toutes les autres pour rendre compte de ce que nous pourrons appeler le temps des pionniers sur les métavers.

Notre intuition se trouve aujourd’hui récompensée par la reconnaissance qu’Europ Assistance et Cetelem ont reçu lors du concours Intraverse133, le 5 juin 2008, pour leurs actions sur Second Life.

133 Le concours était présidé par Philip Rosedale en partenariat avec l’ADETEM, l’ANDESE, la Fabrique du Futur et TEC. Son jury était composé d’experts, d’utilisateurs et chercheurs, français. Cf. http://b-r-ent.com/news/resultats-du-prix-intraverse-2008

Ainsi Cetelem, à travers BNP Paribas, se voit décerné le 1er prix, et Europ Assistance, le deuxième prix, dans la catégorie « Grand Compte ».

Dans la catégorie Recherche & Développement, signalons que c’est l’agence Community Chest dirigée par Robert Vinet qui a reçu le premier prix, à travers Shell.

Voilà une agence, faisant autorité en matière d’expériences sur Second Life, qui a su rester accessible puisque c’est la seule, à travers la personnalité de Robert Vinet qui ait accepté de m’éclairer sur des pratiques Marketing dans un métavers et grâce auquel nous avons pu passer, en quelque sorte, de l’autre côté du décor. (cf. partie III du mémoire).

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Approches de deux marques de services dans Second Life
Université 🏫: Université De PARIS IV – SORBONNE CELSA - Ecole des Hautes Etudes en Sciences
Auteur·trice·s 🎓:
Brunet Sylvie

Brunet Sylvie
Année de soutenance 📅: Mention : Information et Communication - Promotion 2006
Rechercher
Télécharger ce mémoire en ligne PDF (gratuit)

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Scroll to Top