Lien entre pauvreté et consommation d’aliments riches en énergie

3.2 Lien entre pauvreté et consommation d’aliments riches en énergie

Une étude de Chou et al. (2004) a trouvé que l’IMC est inversement lié au prix réel de la nourriture dans les restaurants de fast-food, du panier d’épicerie et dans les restaurants plein- service. Mais, l’élasticité du prix par rapport à l’IMC serait plus importante pour les restaurants de fast-food que dans les deux autres cas. Pour résumer la pensée de ces auteurs, la baisse du prix réel de la nourriture compterait pour beaucoup dans la tendance à la hausse de l’obésité.

Selon-eux, la demande croissante pour de la nourriture rapide combinée à l’innovation technologique et la réalisation d’économies d’échelle, pour accommoder cette clientèle ont eux comme conséquences de réduire le prix réel de la nourriture, dans les restaurants de fast-food particulièrement.

D’après les chiffres de Drewnowski et Darmon (2005), les taux les plus élevés d’obésité et de diabète se retrouvent dans les couches les plus pauvres de la population aux États-Unis. Étant donné leur pauvreté, ces personnes se doivent de trouver la source la plus abordable d’énergie calorique pour subvenir à leurs besoins et non pas nécessairement la nourriture la plus nutritive.

En effet, « le besoin calorique quotidien d’une femme peu active physiquement est de l’ordre de 1800 calories et de 2100 calories pour un homme. » (http://www.plurielles.fr/src/scripts/plurielles/popupToolbar.php) Selon Drewnowski et Darmon, la qualité de la diète dans les pays industrialisés est fonction de la classe sociale. Bien qu’en moyenne, la diète d’un américain soit composée d’environ 40 % de sucres et de gras ajoutées, les ménages plus riches ont une diète de meilleure qualité et plus variée avec une proportion plus élevée de viandes maigres, fruits de mer, légumes et fruits. En revanche, les ménages à faible revenu vont avoir une diète à plus forte teneur en viande à faible coût, grains peu coûteux, sucres ajoutés et gras, et faible en fruits et légumes.

La banane, qui est le fruit le moins coûteux (cal/$) était le fruit le plus acheté par les ménages pauvres, loin devant les fruits plus coûteux (comme les framboises et autres baies). Donc, plus les aliments sont mauvais pour la santé, moins ils coûtent cher (en plus d’avoir davantage de goût, être moins longs à préparer et plus faciles à trouver), ce qui encouragerait le consommateur à mal manger, particulièrement s’il est serré dans son budget.

D’après Drewnowski et Darmon, l’inflation importante du prix des fruits, des légumes et autres aliments «santés» dans les dernières années a eu pour effet de tourner les ménages pauvres vers les aliments chez lesquels il y a eu une plus légère augmentation des prix. Le lien entre obésité et pauvreté serait donc expliqué par des variables purement économiques.

Ces auteurs ont utilisé l’enquête diététique Val-de-Marne pour estimer la consommation alimentaire quotidienne de leur échantillon. Ils y ont trouvé que le coût moyen de la diète était de 5,59 €/jour pour les hommes et de 4,63 €/jour pour les femmes (en € de l’an 2000), soit 5 €/jour en moyenne. Les femmes consommaient davantage de fruits et de légumes et avaient une diète plus diluée en énergie.

Le coût énergétique moyen par 10 MJ d’énergie était plus élevé pour les femmes (6,56 €/jour) que pour les hommes (5,85 €/jour). Ceci veut dire que les femmes choisissaient mieux leur nourriture et consommaient moins de calories au total quotidiennement que les hommes.

Dans un modèle de régression ajusté pour l’âge et le sexe, Drewnowski et Darmon (2005) séparent les répondants en quintile, selon leur consommation d’énergie (MJ par jour). Ils y étudient la relation entre la composition et le coût de la diète.

Ces auteurs ont observé que chaque augmentation de 100 grammes de la consommation de fruits et de légumes était associée à une augmentation du coût de la diète allant de 0,18 à 0,29 €/jour selon la consommation calorique de la personne. En revanche, pour chaque augmentation de 100 grammes de la consommation de gras et de sucre, il y avait une réduction du coût de la diète allant de 0,40 €/jour à 0,13 €/jour selon le quintile de consommation d’énergie dans lequel la personne se trouve.

Donc, un consommateur voulant réduire son budget alimentaire pour des raisons financières n’aura pas le choix de manger de la malbouffe à haute densité calorique. Sauf, s’il est prêt à sacrifier le goût et à se distancer des normes sociales en adoptant des habitudes alimentaires hors-normes. Car, selon ces auteurs il est possible de manger sainement et d’obtenir les calories nécessaires à faible coût en mangeant : du foie, des légumes séchés, des arachides et du poisson en conserve.

Ceci bien sûr, si le consommateur est au courant du faible prix de ces aliments, s’il n’a pas jeté son dévolu sur la malbouffe plus facilement accessible, plus publicisée et meilleure au goût et s’il a conscience de sa santé.

Drewnowski et Darmon (2005) affirment que les ménages américains à faible revenu dépensaient approximativement 1,43$ de moins par personne, par semaine pour des fruits et des légumes frais, par rapport aux ménages à haut revenu. Ceci peut s’expliquer par l’écart croissant dans la différence de prix, de 1985 à 2000, entre les aliments «santé» et les aliments «non-santé».

Par exemple, selon leurs observations, en 15 ans, le prix des boissons gazeuses a augmenté de 20 % tandis que le prix des fruits et des légumes frais a augmenté de presque 120 %. Cette différence dans l’inflation a contribué à accentuer la disparité dans l’accès à une diète santé. De plus, ces auteurs ont constaté que si l’on impose une contrainte de coût à un individu, cela va avoir une forte influence à la hausse sur la densité énergétique de sa diète.

Mais, si l’on décide délibérément d’augmenter la densité énergétique de sa diète, cela va avoir un impact sur le coût de la diète qui va baisser légèrement. Par contre, l’effet de la contrainte de coût est beaucoup plus grand que celui de la contrainte d’énergie. Autrement dit, délibérément choisir d’augmenter sa consommation énergétique ne fera pas nécessairement diminuer le coût de notre liste d’épicerie.

En revanche, si l’on doit diminuer son budget alimentaire, cela va avoir comme impact quasi-inévitable de fournir une diète plus dense en énergie. Ceci veut donc dire que suivre une diète équilibrée n’est donc pas également abordable, si l’on tient compte de la réalité économique d’un ménage.

Selon Drewnowski et Darmon (2005), le coût moyen, par personne, de la diète de Atkins a été estimé à 14,27$/par jour et le coût moyen de la South Beach Diet à 12,78 $/par jour. Ces chiffres contrastent avec le 4 $/par jour que certains ménages américains à faibles revenus dépensent, en moyenne, par personne pour leur nourriture.

En résumé, plus un aliment est dense en énergie et moins le coût de son énergie va être élevé. Ceci fera en sorte que les individus provenant des milieux socio-économiques défavorisés seront plus portés à choisir cette nourriture, ce qui aura comme effet d’accentuer le taux d’obésité dans ces groupes.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
La situation de l’obésité juvénile au Canada
Université 🏫: Université du Québec à Montréal UQAM
Auteur·trice·s 🎓:
Jules Dessureault

Jules Dessureault
Année de soutenance 📅: Mémoire présenté comme exigence partielle de la maîtrise en économique - 2010
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