Evolution du secteur de tourisme, Possibilités de développement

Evolution du secteur de tourisme, Possibilités de développement

Section 2

Des possibilités de développement

Nous avons déjà souligné la complexité d’une parfaite connaissance du secteur tourisme du fait de son incessante évolution. En essayant de mieux cerner les facteurs internes comme externes, conjoncturels ou non des variations qui sévissent dans ce domaine, nous pourrons mieux appréhender (voire anticiper) d’éventuels nouveaux changements et y adapter rapidement différentes stratégies permettant ainsi au milieu concerné d’utiliser à son profit ces « innovations » ou d’éviter les impasses qui pourraient en découler.

Quelques règles et contraintes (économiques, sociales et environnementales) à respecter doivent également faire l’objet d’une étude approfondie si l’on ne veut pas risquer d’être pris au dépourvu devant des erreurs de jugements qu’il ne serait pas aisé de corriger après coup.

1. Un secteur qui évolue

C’est une grande quantité de facteurs influant sur la demande mais aussi sur l’offre qui peut faire varier les performances ou contre-performances du secteur tourisme. Ces facteurs externes comme internes à l’activité tourisme s’expliquent toujours de manière plus ou moins évidentes.

1.1. Des facteurs externes

Ces variations peuvent être tantôt ponctuelles, tantôt étalées sur de plus longues périodes selon les effets qui les produisent. On a pu ainsi constater au cours de l’été 1990 une baisse de la demande vers certaines régions littorales et insulaires avec des creux allant jusqu’à -20%. Cette baisse ne semblait pas provenir uniquement de circonstances conjoncturelles, mais également d’une grande transformation des habitudes de loisirs et de tourisme. Le souhait de trouver une destination où le tourisme est bien intégré à l’environnement semble être devenu une exigence de la part du consommateur et donc un impératif pour toute politique de développement de ce type.

Ceci constitue un véritable « challenge » pour les petites économies insulaires compte tenu de l’exiguïté de leur territoire et parfois justement de leur difficulté à résoudre les problèmes de protection d’environnement et d’aménagement en général. C’est pourtant l’une des conditions sine qua non au maintien d’une relative compétitivité au niveau international.

On constate actuellement un déclin de la fréquentation et donc des recettes pour les régions du Sud de l’Europe et notamment pour certaines régions insulaires telles que les îles Baléares et Canaries.

Cette chute pourrait être moins ponctuelle que le phénomène de 1990 comme les « crises » liées à la croissance économique (qui détermine pour une large part l’emploi et les revenus), les taux de changes (qui déterminent l’évolution du pouvoir d’achat des résidents et non-résidents), et la répartition (qui détermine l’évolution du pouvoir d’achat des consommateurs).

Ce sont là les principaux facteurs susceptibles de faire varier la demande sur une longue période.

1.1.1. Influence de la croissance économique

Ainsi, entre 1950 et 1975 on a vu une croissance très rapide des économies des pays occidentaux (+5% par an) et également une croissance très rapide du tourisme international (+6% par an). Malgré cela, certaines régions insulaires n’ont pu profiter dans les mêmes proportions de cette croissance à cause entre autres d’une insuffisance d’infrastructures de transport ; ce fut le cas pour les îles du Pacifique Sud, de l’océan Indien et de certaines îles de la Caraïbe.

Par contre, la chute des taux de croissance entre 1975 et 1995 (2% par an) et même les années de récession 1975-1981 et 1992-1993 dans plusieurs pays de l’OCDE ont engendré une stagnation du tourisme international notamment en 1983 et 1991. De nombreuses destinations insulaires ont été particulièrement touchées par cette diminution du taux de croissance économique dans les principaux pays émetteurs de touristes internationaux, ce fut le cas pour les îles de la Méditerranée et de la Caraïbe.

On comprend aisément que même la simple stagnation d’une croissance faible aura des effets négatifs sur la demande ne serait-ce qu’en impliquant une insuffisance de créations d’emplois et donc une montée ou le maintien à un niveau élevé du chômage.

1.1.2. Les taux de changes

L’influence des taux de changes sur le secteur tourisme est tout aussi évident. La période de stabilité de ces taux correspondait à une progression continue des dépenses touristiques dans les principaux pays avant 1976 et l’instauration officielle du système monétaire international des taux de changes flottants. Les taux n’étant plus soumis aux seules décisions des gouvernements mais résultant du fonctionnement du marché des changes, vont subir des variations plus importantes et plus fréquentes.

Les régions insulaires dont la monnaie est rattachée à celle de grandes zones monétaires, principalement aux monnaies européennes et au dollar américain, seront donc dépendantes de ces fluctuations. La venue de l’Euro aura sans doute pour effet de limiter ces fluctuations (?).

1.1.3. La répartition du PNB

Enfin, « les politiques de répartition du Produit National Brut ne paraissent pas actuellement favoriser la croissance du tourisme international » (Vellas, 1992).

En effet, la priorité retenue par les gouvernements est la compétitivité internationale avec comme préocupation principale, le souci de l’adaptation de l’appareil productif. Ce qui signifie une plus forte progression des investissements et de la productivité aux dépens de la consommation et donc des loisirs.

Par conséquent, l’une des données de base concernant l’avenir proche du marché international du tourisme est que, sauf renversement imprévisible de tendance, il ne faut pas s’attendre à une nouvelle progression du tourisme de masse qui résulterait d’une redistribution du pouvoir d’achat au profit des ménages ; mais plutôt à une grande sélectivité de la demande touristique qui résulte, pour les consommateurs, de la nécessité d’effectuer des choix budgétaires y compris dans leurs dépenses touristiques.

Ces trois principales variables macro-économiques externes au secteur tourisme ont surtout des effets sur la demande, effets qui ne sont pas directement liés à celle-ci. Mais, il arrive également que cette demande évolue et provoque elle-même une évolution du secteur tourisme du fait de l’obligation qu’a l’offre de s’adapter au mieux aux nouvelles orientations.

1.2. Facteurs internes d’évolution du secteur tourisme

Ces facteurs émanant donc directement d’une évolution spécifique du tourisme ou directement de la demande touristique ont des effets souvent plus favorables à la croissance du tourisme insulaire. Trois d’entre eux sont souvent montrés en exemple par les auteurs d’ouvrages relatifs à l’économie du tourisme, il s’agit de :

  •  L’allongement de la durée des périodes de vacances.
  •  La fragmentation des séjours de vacances.
  •  La déréglementation des transports aériens.

L’allongement de la durée des périodes de vacances est un facteur évidemment favorable au développement du tourisme. Les années 80 ont largement contribué à sa mise en place notamment à travers une augmentation considérable, dans de nombreux pays comme la France, de la durée des congés payés ou encore grâce à l’adoption de la cinquième semaine ou encore au Japon, avec l’obligation pour de nombreux employés de prendre réellement les vacances auxquelles ils ont droit.

Ces effets ont été très favorables aux destinations insulaires, notamment dans les régions tropicales, puisqu’ils ont provoqué un accroissement du nombre de séjours hors saison.

La fragmentation des séjours de vacances est liée à l’allongement de la durée des périodes de vacances. Un salarié peut aujourd’hui bénéficier, en comptant les jours fériés, d’une période de vacances allant jusqu’à huit semaines dans l’année. Il est souvent difficile voire impossible pour un employeur de se passer d’un élément de son entreprise pendant une telle durée.

De plus, le salarié préfère souvent profiter tout au long de l’année de ce repos, soit parce qu’il lui permet une coupure dans sa vie quotidienne, sorte de rupture avec l’habituel « métro-boulot-dodo », matérialisée par un départ vers un autre train de vie ; soit pour permettre aux enfants de voir d’autres modes de vie (la vie à la campagne par exemple), ce qui implique de faire coïncider plusieurs séjours avec les repos scolaires.

Une autre explication consiste à dire que le salarié souhaite effectuer des séjours avec des thèmes et des objectifs différents ; un repos complet, qui permet souvent d’effacer le stress de la vie quotidienne, la pratique de sports divers, impliquant généralement un séjour plus long ; le contact avec d’autres réalités culturelles, le séjour étant alors d’abord perçu comme la visite de lieux nouveaux et inconnus.

Cela implique donc une large diversification des destinations choisies par le vacancier. Les milieux insulaires auront donc intérêt à proposer un plus grand nombre de produits, correspondant aux différentes attentes des consommateurs, et proposables sur les différentes périodes de l’année.

La déréglementation des transports aériens avec l’abaissement des prix qu’elle provoque, influence également très favorablement la demande touristique, notamment en rendant concurrentielles les destinations touristiques éloignées, face aux vacances traditionnelles de proximité. C’est ainsi que, par exemple, pendant l’hiver, les plages des îles de la Caraïbe concurrencent de plus en plus les sports d’hiver tant en Europe qu’aux Etats-Unis.

Ces multiples évolutions doivent être prises en compte par les décideurs. Les professionnels du tourisme vont devoir s’adapter non seulement aux variations conjoncturelles mais également aux changements de moeurs d’une clientèle de plus en plus désireuse de vivre ses vacances comme elle l’entend. C’est selon Gilbert Trigano « le passage d’un tourisme de la civilisation de l’avoir à la civilisation de l’être ».

Nombre d’éléments déjà mis en évidence dans cette étude montrent que les petites économies insulaires disposent d’atouts, comme la diversité des offres possibles, susceptibles de faciliter cette adaptation. « Ces nouvelles technologies…(d’adaptation de l’offre à la demande par l’innovation)…sont désormais accessibles aux îles, encore faut-il qu’il y ait une volonté politique suffisante et une prise de conscience pour permettre une large diffusion dans l’offre touristique » (Vellas, 1992).

1.3. Des innovations

Les innovations doivent intervenir dans plusieurs domaines puisque, nous l’avons suffisamment détaillé, le produit touristique est en fait une combinaison des « sous-produits » le constituant.

Elles doivent répondre au mieux aux influences conjoncturelles sur la clientèle (durée plus longue, plus fragmentée et solvabilité plus faible), mais aussi aux souhaits de cette clientèle devenue plus exigeante.

Les îles, pour jouir de l’atout diversité dont elles disposent en matière de patrimoine historique, culturel, artistique et autres richesses naturelles, devront mettre en place une stratégie de valorisation systématique de ces avantages comparatifs en créant des produits spécifiques correspondant aux tendances en vogue, tourisme d’environnement, d’affaires, culturel, du troisième âge, de santé remise en forme et de week-end ou courte durée. Outre l’activité touristique proprement dite, un remaniement de ses deux éléments de base que sont le transport et l’hébergement s’impose.

En matière d’hébergement, les facteurs externes et internes vus précédemment amènent de plus en plus le visiteur à chercher un lieu de résidence relativement peu onéreux (en fonction de la conjoncture) et où divers services seront facilement et rapidement accessibles, comme une restauration rapide par exemple (cette fois, du fait de la fragmentation des séjours plus courts).

Face à ce type de demande, de nombreuses chaînes hôtelières se sont développées en particulier aux Etats-Unis (Hampton Inn, La Quinta ou Fairfield Inn créé par Marriot) et en Europe, notamment en France avec les chaînes deux étoiles Ibis, Campanile, Climat de France et autres. Ces nouveaux produits hôteliers permettent d’allier compétitivité des prix et confort, avec également une forte hausse de la productivité obtenue par une diminution des surfaces utilisées et une réduction significative des coûts en travail.

En résulte une augmentation de la rentabilité, l’adéquation recherchée de l’offre à la demande, et une forte progression de ces hôtels au détriment de l’hôtellerie traditionnelle qui doit supporter des coûts élevés.

Toutefois, cette innovation correspond seulement à l’un des aspects de l’évolution de la demande qui est fortement lié aux changements indépendants de sa volonté.

Cependant, les exigences issues directement de la clientèle peuvent présenter un aspect beaucoup plus qualitatif ; au cours d’un séjour « découverte », rencontre d’une autre culture, la volonté de s’intégrer au maximum aux traditions en vigueur sur le site amènera le visiteur à choisir un hébergement justement « traditionnel » dans le sens culturel du terme.

Les îles bénéficient largement de cet effet, les gîtes ruraux, séjours chez l’habitant et locations de villas, ou autres habitations typiques y sont donc très bien côtés, même si la montée du « tout organisé » les touche aussi, notamment à travers les réservations importantes en villages de vacances.

Les transports, principalement aériens, peuvent également jouer un rôle essentiel dans l’adaptation du tourisme dans les îles. La mise en service commercial depuis le début de l’année 1993 des nouveaux avions Airbus A340, puis des Airbus A330 et des Boeing 777, va permettre de moduler l’offre touristique et de l’adapter à la demande.

En effet, ces nouveaux avions présentent un intérêt tout particulier pour le développement touristique des îles du fait de leur moindre capacité 200 à 300 passagers, de leur très long rayon d’action (plus de 12.000 Km) et des économies qu’ils représentent.

Au vu de tous ces éléments, on doit constater que rien ne semble s’opposer à une stratégie de développement durable d’un tourisme de qualité, recherché et appréciable par le visiteur, dans les petites économies insulaires. Si ce n’est que ce tourisme doit être à son tour adapté aux spécificités des îles, que nous avons largement exposées dans la première section.

Le respect de ces particularités doit être pour les acteurs du tourisme, un objectif principal, une condition sine qua non au succès et à la longévité de toute opération de développement touristique.

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Tourisme et Développement Régional
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